Mais si, ton avis et ta réflexion sont intéressants !
Kurai a écrit : ↑ven. 11 oct. 2019 14:51
Si je pense qu'effectivement vouloir tout expliquer par la douance/non-douance est une grossière erreur, et donc par extension de vouloir chercher des caractéristiques pour ces groupes de personnes n'a pas de sens (je pense qu'on peut tout à fait être très anxieux sans être doué, par exemple et inversement),
je vois le côté pervers qui consiste à se dire qu'au final, si on se sent mal, ce n'est pas du tout à cause d'un fonctionnement cognitif différent (j'élimine volontairement ici le terme de haut potentiel parce que je le trouve trop réducteur).
Je vois ça comme toi : aucun des extrêmes n'est juste, je pense. Ni postuler que la "douance" (pour nous épargner des périphrases) est responsable de tout, ni postuler qu'elle ne joue au contraire aucun rôle.
Je réfléchis à ça sans cesse depuis que je m'intéresse au sujet : j'ai toujours l'impression d'avoir compris très peu, ou du moins de n'avoir que cerné les choses, et je ne suis pas scientifique ni psychologue, mais je pense que si ce fonctionnement cognitif peut jouer dans le développement psychologique de l'individu, c'est forcément (attention, truisme...) en miroir avec la société, avec les autres. Dans l'image qu'un individu se fait de lui en fonction de celle qu'on lui renvoie. Et là, évidemment, les variations sont immenses puisque nous ne vivons pas tous avec les mêmes autres... Et que nous ne vivons pas tous les mêmes choses.
Kurai a écrit : ↑ven. 11 oct. 2019 14:51
Cela nourrit à mon sens un autre discours qui consiste à dire que si certains enfants surdoués ont été exclu et se sont senti mal pendant leur développement, c'est en grande partie de leur faute ou de celle de leur parent parce que l'éducation qu'ils ont reçus leur ont fait développer volontairement ou involontairement un complexe de supériorité.
Je pense que cet aspect ne concerne qu'un certain nombre d'enfants : ceux qui ont une idée, confirmée ou non, de leur "supériorité". Je mets entre guillemets et j'ajoute immédiatement que je reprends le mot exprès : il peut y avoir des enfants qui se sentent supérieurs aux autres, notamment parce que c'est l'image qu'on leur donne d'eux. Avec ou sans test pour confirmer le hpi, d'ailleurs. Un enfant intelligent sera a priori valorisé, au moins scolairement, parfois par sa famille, et cet élément interviendra forcément, à mon avis, dans son image de lui et dans la construction de son identité (surtout s'il correspond aussi aux attentes de ses parents, en matière de comportement par exemple - s'il se conforme à l'éducation qu'il reçoit, disons). Si on le laisse dans cette vision simpliste (mais il ne peut pas s'en rendre compte, enfant - même les adultes parfois ne s'en rendent pas compte), si on ne l'aide pas à intégrer cette donnée et à appréhender ce qu'elle signifie, du moins autant que possible, il va grandir avec une vision faussée de lui-même - qu'elle soit génératrice ou non d'exclusion, d'ailleurs.
En revanche, il y a des enfants surdoués qui ne s'illustrent pas nécessairement par leur intelligence, qui sont dans la moyenne, qui s'en sortent sans problème, qui n'ont pas de difficultés dans leurs études mais sans exploser les compteurs non plus ; des enfants donc qui ne se feront pas remarquer pour cette caractéristique : leur image d'eux-mêmes ne sera pas basée sur ce point-là. Ou pas autant. Ou différemment, en contrepoint, par exemple.
Peut-être se sentiront-ils différents des autres, mais autrement.
Et donc, comment étudier scientifiquement quelque chose qui imprègne la personnalité de chacun de manière si étroitement liée au reste, si indissociable du reste ? Comment envisager cela autrement que par la porte d'entrée subjective, c'est-à-dire au sens premier, du sujet ? C'est-à-dire dans la réflexion de chacun sur sa propre histoire, en y intégrant toutes les composantes (connues)... c'est-à-dire, en somme, le chemin de toute une vie...
Kurai a écrit : ↑ven. 11 oct. 2019 14:51
Je pense qu'il est plutôt intéressant de se concentrer justement sur les personnes qui seraient HP et en difficulté, et voir si effectivement elles présentent des traits communs liés à leur intelligence et qui pourrait expliquer leur ressenti et contrebalancer d'autres théories du type "vous êtes borderline, vous êtes schizoïdes.. blabla" qui sociologiquement ont un double impact: la personne se croit folle, et si elle ne l'est pas, va s'enfoncer à tort dans une idée très mal perçue par la société, et en plus suivre une thérapie qui ne va pas nécessairement la soigner mais la forcer à entrer dans un moule particulier. Et si cette personne est intelligente, à mon sens, elle n'aura aucun mal à s'adapter et justement développer un comportement à ce qu'on attend d'elle, plutôt que de se retrouver réellement.
Oui, dans l'idéal, ce serait bien de pouvoir dire "Attention, cet enfant est hp, il aura peut-être plus de risque de ceci ou de cela, s'il est confronté à telles choses, à tel entourage, à telle éducation, à telles difficultés, ou si à côté d'être hp, il est anxieux, ou ceci ou cela." Et c'est, je crois, un des enjeux pour les parents qui font tester leur enfant. Mais justement, risque de quoi ? Peut-on mettre quelque chose de concret en évidence, qui ne serait pas co-dépendant de tout le reste que j'ai évoqué plus haut ?
Dans ma réflexion personnelle (et j'insiste sur "personnelle"), j'en suis arrivée à penser que si critère commun il y a, ce devrait être dans l'ampleur, ou l'amplitude, de la résonance interne. Dans la profondeur de l'empreinte intérieure des événements extérieurs (ou intérieurs, d'ailleurs), et peut-être sa persistance. Ce qui pourrait mener, dans le cas de difficultés, à des tableaux psychologiques (c'est l'expression adéquate ? Je ne suis pas sûre...) faisant penser à tort à des pathologies, des troubles. Ceci tout en gardant à l'esprit qu'il peut aussi y avoir pathologie
et douance, et que même sans pathologie, les difficultés psychologiques ne se résolvent pas par le fait de savoir qu'on est hp et pas fou. Écarter une pathologie ne peut être que rassurant, c'est certain, mais ça ne fait pas tout.
Et donc, on y revient encore : comment démêler la pelote autrement qu'en observant son reflet dans tous les miroirs que nous renvoient ou nous ont renvoyé les autres, nos autres, et en y intégrant tout de qui relève de notre histoire personnelle ?