Ce que tu écris me parle, Légo, mais peut-être pas pour les raisons que tu penses…
Dans mes lointaines études de lettres, j'avais lu, relu, et re-relu que l'on écrivait, même quand on écrivait a priori « pour soi » toujours à quelqu'un. Mais il est vrai qu'il y a une différence entre une personne réelle à qui on écrit et ce que l'on appelle en littérature le « narrataire » qui est l'instance à qui on s'imagine écrire (l'envers du narrateur, l'instance de l'énonciation).
Ph. Lejeune, grand spécialiste français du journal intime (ses livres se lisent bien pour ceux qui s'intéressent à la question, et il a écrit tant sur le journal papier que sur les blogs, et autres), soutient cette thèse que même un journal dit « intime » en français (en anglais :
diary, en allemand :
Tagebuch, pour ces deux langues que je connais, sans aucune notion de l'intime dans ces deux mots, seulement celle du temps) s'adresse à quelqu'un. Ou à : quelques uns. Même si ces quelques uns n'en sauront jamais rien et que ces quelques uns ne sont peut-être pas des personnes réelles.
Sinon, pour répondre à cette question : j'adore écrire. J'écris depuis que j'ai sept ans (depuis que je sais écrire, grossièrement). J'aime écrire et, si possible, j'aime « bien écrire ». Qu'il y ait un peu de style. Le mien. J'écrivais des histoires qui ne finissaient jamais, j'ai commencé à tenir un journal à douze ans qui me suit toujours, et depuis que j'ai un ordinateur, j'ai déjà commencé à remplir certains dossiers de brouillons pas trop moches (selon moi).
J'ai reçu maintes et maintes fois des compliments quant à mon propre style, jusqu'à mes enseignants d'université (notamment pour mon mémoire de master 1 de psychologie), plus souvent de manière informelle par des proches (amis) ou enseignants. J'avais notamment commencé des études de lettres, que je n'ai jamais terminées, pour m'engouffrer un peu plus dans ce qui me dévorait de l'écriture à l'époque. Car l'écriture peut consumer une vie.
Mais j'écrivais aussi parce que j'allais mal, très mal. Travailler sur moi m'a permis de débarrasser en grande partie mon écriture certainement d'une grande partie des éléments névrotiques qui devaient l'encombrer ; en revers, je n'écris plus vraiment, si ce n'est dans mon journal, quand j'ai le temps et que je ne suis pas trop happée par mon travail et mes études.
Je ne dis pas que je n'essaierai pas de faire publier un journal. J'ai quelques idées sous le coude. Et parce que l'écriture pour moi n'était pas qu'un exutoire et qu'il y avait aussi quelque chose de l'écriture pour l'écriture, du comment dire, du comment le mieux dire, le plus justement, le plus joliment…
En revanche, j'ai tendance à écrire les choses les unes à la suite des autres, d'un jet presque et à assez peu construire en amont. Je suis séquentielle là-dessus comme je le suis souvent quand je lis un livre (je peux lire trois-quatre, voire plus, livres en même temps, mais en général, je suis séquentielle, même pour mes livres de cours). Construire un plan me casse la tête depuis toujours, que ça ait été pour mes copies (j'en ai beaucoup souffert) ou pour une histoire. J'ai dû faire des plans pour les commentaires composés et les dissertations, mais c'était rarement complètement premier dans le processus de travail, et ça ne pourrait pas être premier dans le processus d'écriture. Généralement je forge le plan au fur et à mesure, à chaque fois que certains questionnements et cheminements le rendent nécessaire. Je prends très peu de notes, en général.
Je ne n'ai pas, j'ai l'impression, comme DelphineB ou Mercador, l'impression de tirer un plaisir fou à inventer l'histoire des personnages. J'ai le plaisir d'écrire, et d'écrire bien. (Comme d'autres aiment s'entendre parler, quoi.

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Comme Mercador, d'ailleurs, je ne me suis pratiquement jamais relue. Aujourd'hui, c'est quelque chose que j'affronte plus sereinement, ce face à face entre moi et moi-même. Par contre, quand j'envoie quelque chose à quelqu'un, il est pour moi hors de question que cette personne puisse lire mes propres écrits, de quelque nature qu'ils soient (en dehors des observations médicales, dont je me contrefiche royalement de la qualité stylistique), devant moi.
Sinon, ta suggestion, Mercador, bien qu'elle me semble presque plus relever du cadavre exquis, me fait penser à ces ouvrages qui viennent de sortir (je n'ose dire « littéraires », j'ignore s'ils le sont ou non, mais le projet est séduisant en soi) :
U4. Si quelqu'un a lu…