Je voulais vous faire partager cet aphorisme de Nietzsche :
"Un moyen capital de se rendre la vie plus légère est d'en idéaliser les évènements; mais il faut se faire d'après la peinture une idée claire de ce que c'est qu'idéaliser. Le peintre désire que le regard du spectateur ne soit pas trop exact, trop aigu, il le force à se rendre à une certaine distance, pour considérer son œuvre de là; il est obligé de supposer que celui qui regarde le tableau est placé à une distance très déterminée; mieux encore, il lui faut admettre chez son spectateur un degré d'acuité de l’œil également déterminé; sur ces points il n'a pas le droit d'être indécis. Tout homme donc qui veut idéaliser sa vie ne doit pas vouloir la regarder trop précisément et doit toujours reculer son œil à une certaine distance."
Je trouve que cet aphorisme s'adresse d'une certaine façon à la lucidité cruelle qui caractérise notre vision du monde et, par extension, à notre vision de notre propre existence.
Prendre le recul évoqué par Nietzsche reviendrait donc à occulter sciemment les détails imparfaits. (Comme chacun le sait, le diable est dans les détails)
N'est-ce pas un mensonge nécessaire à l'allègement de la vie ?
De l'allègement de la vie
- Cyrano
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De l'allègement de la vie
On ne reste parfois fidèle à une cause que parce que ses adversaires ne cessent d'être
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Re: De l'allègement de la vie
Je ne vois pas de mensonge, plus de la remise en perspective. Aucune vie ne peut être parfaite dans tous les détails même scrutés avec la plus grosse loupe. D'ailleurs, comme un tableau hollandais du XVIIe soigné au quart de poil de pinceau, ça serait vite rigide, ennuyeux, sempiternel.
J'espère que tu n'es pas allergique à l'impressionnisme, mais regarde "Impression, soleil levant". Trop près, les reflets de l'eau sont des coups de pinceau abrupts semés comme des cailloux, il n'y a pas de bateaux mais des traits qu'on dirait tirés au doigt, etc. A la distance voulue par l'artiste, il n'y a plus de traits, ni de cailloux ni de bavures mais un matin frisquet sur le quai d'un grand port, rendu d'une manière que je trouve, personnellement, bien plus vraie, faisant plus résonner les sens que si chaque bateau était minutieusement dessiné façon XVIIIe.
Ni erreur, ni mensonge, mais le choix de la juste perspective.
Notre vie ne peut être un pur idéal dans les moindres détails. C'est notre condition, c'est ainsi. Mais c'est un appel à admettre que le mur est blanc et le considérer comme réellement blanc, sans passer notre temps à gémir parce que, le nez dessus, on a fini par remarquer une petite tache.
La tache est là, mais elle n'a pas de sens. La blancheur qui l'entoure, si. Est-on lucide, le nez sur un mur ?
Cela veut dire qu'il faut être juste là où cela fait sens, et ce n'est pas avec le nez dessus qu'un tableau prend du sens. Ce n'est pas une vision plus juste de le scruter à la loupe, c'est même une aberration. Se reculer à la distance où le tableau prend tout son sens, ce n'est pas se mentir en se cachant des défauts, c'est négliger l'accessoire pour embrasser l'essentiel, la vérité.il lui faut admettre chez son spectateur un degré d'acuité de l’œil également déterminé; sur ces points il n'a pas le droit d'être indécis
J'espère que tu n'es pas allergique à l'impressionnisme, mais regarde "Impression, soleil levant". Trop près, les reflets de l'eau sont des coups de pinceau abrupts semés comme des cailloux, il n'y a pas de bateaux mais des traits qu'on dirait tirés au doigt, etc. A la distance voulue par l'artiste, il n'y a plus de traits, ni de cailloux ni de bavures mais un matin frisquet sur le quai d'un grand port, rendu d'une manière que je trouve, personnellement, bien plus vraie, faisant plus résonner les sens que si chaque bateau était minutieusement dessiné façon XVIIIe.
Ni erreur, ni mensonge, mais le choix de la juste perspective.
Notre vie ne peut être un pur idéal dans les moindres détails. C'est notre condition, c'est ainsi. Mais c'est un appel à admettre que le mur est blanc et le considérer comme réellement blanc, sans passer notre temps à gémir parce que, le nez dessus, on a fini par remarquer une petite tache.
La tache est là, mais elle n'a pas de sens. La blancheur qui l'entoure, si. Est-on lucide, le nez sur un mur ?
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Re: De l'allègement de la vie
J'ai justement l'impression, comme d'autres je pense ici, de m'attarder sur ces détails qui n'ont finalement, comme tu le dis très justement, aucun sens.
"La tache est là, mais elle n'a pas de sens. La blancheur qui l'entoure, si. Est-on lucide, le nez sur un mur ?"
C'est, pour moi, une question centrale que je dois méditer afin d'accepter de prendre du recul sur les choses.
Si je considère que la lucidité est d'embrasser la totalité de ce qui me compose, la blancheur du mur, comme la tâche, c'en est une encore plus grande que d'accepter qu'un mur immaculé n'existe pas.
Merci Colonel, je cogite.
"La tache est là, mais elle n'a pas de sens. La blancheur qui l'entoure, si. Est-on lucide, le nez sur un mur ?"
C'est, pour moi, une question centrale que je dois méditer afin d'accepter de prendre du recul sur les choses.
Si je considère que la lucidité est d'embrasser la totalité de ce qui me compose, la blancheur du mur, comme la tâche, c'en est une encore plus grande que d'accepter qu'un mur immaculé n'existe pas.
Merci Colonel, je cogite.
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Re: De l'allègement de la vie
Tout comme l'infini, la " perfection" n'existe pas.
Si tu te rapproches encore plus du mur, tu finiras par ne voir que des atomes. Le mur lui-même ne fait plus sens....
Si tu te rapproches encore plus du mur, tu finiras par ne voir que des atomes. Le mur lui-même ne fait plus sens....
Re: De l'allègement de la vie
Magnifique Colonel, voici une réponse remplie de sagesse 

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Re: De l'allègement de la vie
ouai, pareil..
le problème, c'est que le colonel a fusillé ce topic d'un post...
je ne sais pas comment rebondir, développer...
Merci
le problème, c'est que le colonel a fusillé ce topic d'un post...
je ne sais pas comment rebondir, développer...
Merci
Tout le monde peut se mettre en colère. Mais il est difficile de se mettre en colère pour des motifs valables et contre qui le mérite, au moment et durant le temps voulus. (Aristote, Ethique à Nicomaque).
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Re: De l'allègement de la vie
Je deviens officiellement suite à ce post : colonelien.
j'aspire donc à boire les paroles de mon maître à penser.
Et je déconne à peine...
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Et je déconne à peine...

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Re: De l'allègement de la vie
oh la la la... je voulais juste dire qu'en ayant trop la tête dans le sceau on ne voit plus ce qu'il y a autour jusqu'à ne plus savoir où l'on se trouve...
je préfère largement la manière d'expliquer à Colonel!!!
on pourrait rajouter qu'en se reculant plus, c'est tout ce qu'il y a derrière le mur qui apparait alors... et pourquoi pas l'envie d'aller y jeter un œil??
je préfère largement la manière d'expliquer à Colonel!!!
on pourrait rajouter qu'en se reculant plus, c'est tout ce qu'il y a derrière le mur qui apparait alors... et pourquoi pas l'envie d'aller y jeter un œil??
"Ne vous en faites pas, le trac, cela viendra avec le talent" , Sarah Bernhardt.
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Re: De l'allègement de la vie
Tentative de rebondissement....
Sans contre-carrer le propos du Colonel, je me demandais s'il est besoin d'opposer vision du détail et vision globale. Pour moi, ce n'est pas tant la distance qui est importante que ce l'état d'esprit de l'observateur.
Pour reprendre l'image du mur blanc et de sa tache...
On peut effectivement considérer le blanc dans sa globalité, comme l'évoque le Colonel, et c'est "bien"
On peut, à cause de la grande lucidité dont on dispose (que l'on subit ???) constater "oh merde, y'a une tache... c'est pas parfait, ce n'est pas si blanc..." et devenir obsédé par ce détail qui "pourrit" l'ensemble, tout relativiser, perdre pied, spirale de remise en question permanente, cercle vicieux.... pas forcément constructif... pas top...
On peut, grâce à la grande lucidité dont on dispose, (qu'on apprend à ne plus subir, mais à vivre comme un cadeau- même si c pas toujours facile) constater l'existence de la même tache... mais au lieu de tomber dans la spirale infernale précédente, s'en approcher encore et encore... l'observer, son grain, sa forme, son relief... et voir que cette tâche elle-même est une oeuvre d'art singulière, dont l'existence loin de "pourrir" la blancheur qui l'entoure, n'en fait que rehausser l'éclat
Et même si après examen, il s'avère qu'on ne puisse déceler la moindre beauté dans cette tache (ça arrive hein !), sa laideur me pousse à la réflexion...
Pour conclure, je veux être multifocale... pouvoir considérer les choses dans leur globalité, pouvoir ne considérer qu'un détail, et pouvoir faire des liens entre ces deux échelles d'appréhension.
A bien y réfléchir, je me dis que cette façon de voir m'est quotidienne et d'ailleurs, j'ai l'impression de ne pas faire d'aller-retour entre le détail et le global... je les vois en même temps, en tant que détail, en tant que global et avec les connexions qui les relient
Alors ce que j'apprends à relativiser, ce ne sont pas les observations que je fais, mais l'impact qu'elles ont sur ma vie, sur mes choix. Même si parfois c'est dur, que l'envie de baisser les bras me saisit au constat de la connerie du monde (et de la mienne aussi), je redresse la tête, me rappelle les valeurs sur lesquelles j'ai décidé de fonder ma vie (oui, je crois qu'il y a une dimension de choix) et je continue à avancer cahin-caha et à porter un regard d'optimisto-idealo-réaliste sur cet univers que j'habite
Sans contre-carrer le propos du Colonel, je me demandais s'il est besoin d'opposer vision du détail et vision globale. Pour moi, ce n'est pas tant la distance qui est importante que ce l'état d'esprit de l'observateur.
Pour reprendre l'image du mur blanc et de sa tache...
On peut effectivement considérer le blanc dans sa globalité, comme l'évoque le Colonel, et c'est "bien"
On peut, à cause de la grande lucidité dont on dispose (que l'on subit ???) constater "oh merde, y'a une tache... c'est pas parfait, ce n'est pas si blanc..." et devenir obsédé par ce détail qui "pourrit" l'ensemble, tout relativiser, perdre pied, spirale de remise en question permanente, cercle vicieux.... pas forcément constructif... pas top...
On peut, grâce à la grande lucidité dont on dispose, (qu'on apprend à ne plus subir, mais à vivre comme un cadeau- même si c pas toujours facile) constater l'existence de la même tache... mais au lieu de tomber dans la spirale infernale précédente, s'en approcher encore et encore... l'observer, son grain, sa forme, son relief... et voir que cette tâche elle-même est une oeuvre d'art singulière, dont l'existence loin de "pourrir" la blancheur qui l'entoure, n'en fait que rehausser l'éclat
Et même si après examen, il s'avère qu'on ne puisse déceler la moindre beauté dans cette tache (ça arrive hein !), sa laideur me pousse à la réflexion...
Pour conclure, je veux être multifocale... pouvoir considérer les choses dans leur globalité, pouvoir ne considérer qu'un détail, et pouvoir faire des liens entre ces deux échelles d'appréhension.
A bien y réfléchir, je me dis que cette façon de voir m'est quotidienne et d'ailleurs, j'ai l'impression de ne pas faire d'aller-retour entre le détail et le global... je les vois en même temps, en tant que détail, en tant que global et avec les connexions qui les relient
Alors ce que j'apprends à relativiser, ce ne sont pas les observations que je fais, mais l'impact qu'elles ont sur ma vie, sur mes choix. Même si parfois c'est dur, que l'envie de baisser les bras me saisit au constat de la connerie du monde (et de la mienne aussi), je redresse la tête, me rappelle les valeurs sur lesquelles j'ai décidé de fonder ma vie (oui, je crois qu'il y a une dimension de choix) et je continue à avancer cahin-caha et à porter un regard d'optimisto-idealo-réaliste sur cet univers que j'habite