Je n'avais jamais vu ce sujet, malgré son âge. Et je crois qu'il y a des choses à y dire.
Cela dit, je m'étais promis de rester 100% HS, et vlà que je re-saute dessus comme une pute en enfer...
Je crois qu'il est immensément contreproductif de parler de "package surdoué", et de prétendre voir tous les problèmes normaux de la vie à travers cet œilleton. Voilà ça c'est dit.
En dehors de la vie conjugale, j'ai connu pas mal d'expériences de vie en collectivité, dans différents contextes, et dont le cumul se compte en années. J'en retire des principes proches de ceux d'Hêrakles :
1- il faut le
vouloir. Le truc qui ne marche pas, c'est les gens qui prennent une coloc' pour faire des économies mais qui auraient préféré vivre seuls pour le confort de maîtriser l'environnement, et rejettent l'amélioration de qualité de vie qu'on obtient en coopérant sur les problèmes tant collectifs qu'individuels.
2- il faut que chacun ait un espace privé, même très petit, qui soit sacré. Partager les chambres, ou en avoir un qui dort sur le clic-clac du salon, ou avoir les affaires éparpillées et mélangées, ça fonctionne juste un temps, sauf cadre très particulier avec un projet collectif fort.
3- il faut le moins de règles possible ; mais que les règles qui existent soient parfaitement bien appliquées. (cf. espace privé)
Il y a eu des échecs triviaux et évitables. Mais il y a eu aussi de belles réussites, parfois dans des conditions surprenantes. La plus importante pour moi, c'était une année dans une maison délabrée (rien ou presque n'avait été visiblement refait depuis 1932) où on habitait à 9 ou 10 selon les allées et venues, et où j'étais le seul étudiant. Tous les autres étaient des marginaux, chacun dans son genre.
La vie était chaotique et imprévisible, mais on tenait un minimum de structure là où elle était indispensable, et on y a tous trouvé notre compte.
Quand on est 10, il y en a forcément toujours un qui improvise une fête. Toujours un qui en a marre plus tôt que les autres du bordel dans l'évier. Toujours un qui descend en trois jours à lui seul un litre d'huile d'olive bio de Nyons et la remplace par 50cl d'huile d'olive Lidl.
La clef de l'équilibre qui permet de pallier l'absence de règles, c'est que ça ne soit pas toujours les mêmes.
La porte de nos chiottes ne fermait pas (j'ai pas dit "ne fermait pas
à clef ; elle ne fermait pas tout court) alors on avait créé un peu d'intimité en scotchant des pages de magazines de moto pour masquer un peu l'entrebâillement ; ça doublait comme lecture de toilettes.
L'électricité était tellement pourrie qu'on avait remplacé la plupart des fusibles par des pelotes de fil de cuivre, et on coupait à la main le disjoncteur général quand la tentative d'éclairer une pièce se soldait par un son et lumière à base de fumée et d'étincelles le long des câbles encore revêtus de tissu d'avant-guerre.
Le jardin était décoré d'une cinquantaine de lavandes qu'on avait prélevées un soir sur un rond-point d'une zone industrielle, et nos chaises auraient jadis dû être mieux rentrées le soir par le bar où elles avaient servi... Oui, on n'était pas tout clean. En même temps on fonctionnait avec un budget ridiculement petit, rapport aux revenus des gens qui habitaient là, moi inclus.
En y repensant, je crois qu'il y avait deux règles qui permettaient de rendre notre petit monde plutôt harmonieux, mais quelque part on ne les avait jamais explicitées. Ces deux règles étaient tacites et évidentes pour tout le monde, issues de l'habitude, comme une culture.
D'abord, on avait chacun une chambre. Elles étaient très petites, mais on respectait le territoire les uns des autres. On n'allait juste JAMAIS dans la chambre d'un autre, on ne s'y invitait pas même les uns les autres. On n'avait pas de salon, c'est la cuisine ou le jardin qui servaient de lieux collectifs, sans exception. Dans nos chambres on pouvait trouver la tranquillité, et y stocker les affaires qu'on ne voulait pas soumettre aux aléas de la colocation.
Ensuite, si un mec avait besoin de dormir, les autres faisaient gaffe à cantonner le bruit dans les pièces où ils ne dérangeraient pas le dormeur. C'est essentiel. C'est à ça que ça sert, un chez-soi : une base fiable pour affronter le monde. Le sommeil en est une pierre angulaire.
Le reste, au contraire, peut constituer une aventure marrante. Le tout c'est d'assurer les bases. Même si je me sens désormais trop vieux pour ce genre de conneries...
EDITE :
En plus des deux règles tacites, il y avait un troisième facteur : on était tous fauchés. Je pense qu'il faut que les colocataires viennent de conditions sociales similaires, sinon il va se créer rapidement des frustrations sur tout ce qui est mis en commun.