Douance et vocabulaire peu étoffé ne sont pas incompatibles, selon moi. Je crois en être un exemple bien qu'à l'écrit, cela ne transparaisse pas forcément ; l'écriture étant le premier canal d'expression par lequel j'ai appris à diffuser mes idées.
Outre la piste proposée par Mlle Rose qui est un trouble structurel, je présume que l'accès à la culture dès le plus jeune âge impacte le niveau de vocabulaire d'un individu. Disposer d'une bibliothèque à la maison, entretenir des discussions autour de sujets variés au moment d'un repas de famille, être éveillé aux diverses formes d'art, participer à des activités mettant en scène des personnes issues de tous milieux (sport, musique, théâtre...), laisser de la place aux programmes radio-TV intellectuellement riches... entrent en ligne de compte dans l'apprentissage du vocabulaire. En termes d'apprentissage, je pointe ici l'acquisition des nuances, des implicites plus que l'appropriation d'une liste de mots vidés de leur(s) substance(s).
Il m'arrive fréquemment d'insérer un silence dans mes discours afin de me laisser le temps de trouver le mot, la phrase adéquat(e). Non pas, que je ne manque de mots dans mon répertoire mais plutôt de sens. Je sais que le concept recherché pour étayer une prise de parole mais j'ai besoin d'un délai pour relier ledit concept et sa signification.
Petit, j'ai grandi sans livres, sans discussion enrichissantes (sur le plan du vocabulaire, précisons-le), sans chansons à textes, sans langues étrangères (qui parfois permettent de mieux approcher une notion apprise dans notre propre langue), sans musique, sans sport(s), sans brassage des classes sociales. Seule la TV m'a permis de construire une image du monde qui, il est vrai, est souvent éloignée de la dure réalité.
Cela ne m'a vraiment jamais posé de problèmes dans ma jeunesse. Par contre, l'entrée en école supérieure fut le détonateur d'une prise de conscience douloureuse. Si mes capacités intellectuelles m'ont permis d'atteindre ce pallier d'études, mon niveau de culture m'en évinçait, presque. Or, le langage, s'il n'est pas toujours le premier marqueur de possession d'un bagage culturel substantiel, n'en demeure pas moins un outil important pour prendre sa place dans le monde. Je me suis donc attaché (vers 19-20 ans) à rechercher la signification des mots présents dans mon catalogue intérieur afin d'être apte à me faire comprendre dans de nombreux domaines. Cela prend énormément de temps et demande de gros investissements : lecture des livres et contes qui m'auraient tant plu dans mon enfance, varier les plaisirs (théâtres, ballets, sport, cinéma, soirées estudiantines...), m'ouvrir à des domaines qui m'étaient inconnus (arboriculture, économie, taille de pierre...), se forcer à voir d'autres personnes que celles qui nous sont proches... A ce jour, j'éprouve encore des difficultés à m'exprimer oralement de manière fluide sur des sujets qui demandent un vocabulaire soutenu. Comme dit, plus haut, il m'est nécessaire de raccrocher le mot et son essence pour donner à mes interventions la précision que j'estime suffisante. Peut-être est-ce en partie dû à un excès de perfectionnisme (chaque chose à sa place et une place pour chaque chose) mais je reste persuadé qu'un accès précoce à la culture aide à la formation et à l'emploi d'un vocabulaire étoffé.
Enfin, j'ajouterai que des troubles de l'audition peuvent aussi entraver le développement du langage chez l'enfant, et par prolongement son niveau de vocabulaire. Ne pas percevoir certaines sonorités et ne pas s'entendre parler sont un véritable obstacle à cet apprentissage. Les fréquences (occurrences) utilisées dans une langue entrent aussi dans sa composition. Des otites chroniques ou des lésions de l'oreille interne (comme cela a été mon cas), par exemple, sont à prendre en compte dans l'évolution du vocabulaire d'un individu car ne pas entendre signifie ne pas incorporer. La guérison n'est jamais complète et ce qui n'a pas été entendu devient quasiment inexploitable.
Sur ce, j'espère avoir été compris.
