NoWest a écrit :
Donc il n'est pas toujours question de musique et de couleurs chez les synesthètes ! =P
Je te rejoins là-dessus.
Pour ma part, les expériences que vous narrez me sont totalement inaccessibles, car très difficiles à concevoir puisque je ne les vis pas.
Et pourtant, après un travail acharné de thérapies et autres, j'ai découvert que j'étais synesthète. Point question de voir les chiffres ou les mois dans une dimension spatiale quelconque, ni de voir des couleurs dans les lettres. Pas de musique non plus.
Moi, je ressens ce que je vois. Je n'ai jamais voulu poster sur ce topic car il m'est difficile de parler de ce "truc", qui est aussi confus dans ma tête que dans la votre au final.
Mais je me suis décidée, même si le pari est risqué et la pente glissante. J'en vois déjà certains me dire que je confonds la synesthésie avec l'empathie, la sympathie ou la compatissance. Point du tout.
Pour ne pas m'épancher trop, je vous renvoie à ce site que je trouve bien fait, ou, tout du moins, clair et concis :
ici.
D'après ce que j'ai pu lire, il s'agit d'une forme de synesthésie rare, et somme toute méconnue.
De mon point de vue, ce que je peux en dire c'est que très longtemps elle a été un fardeau pour moi, et qu'elle me pèse parfois encore, même si j'ai beaucoup travaillé pour parvenir à me refixer dans mon corps et dans mon ressenti propre dans ces moments où mes perceptions s'affolent.
C'est difficile à expliquer, mais du fait de ce phénomène je suis EXTREMEMENT sensible à la violence. C'est surtout en ce domaine que je le ressens.
A défaut de pouvoir vous livrer une théorie abstraite, ou des études fort à propos, dont je ne dispose pas, je puis peut être vous livrer quelques exemples qui vous apporteront sans doute un éclairage :
- Enfant, je pleurais dans la cour de récré dès qu'un camarade se blessait. Les maitresses ont vite conclu à la contagion des pleurs, ce qui bien sûr n'était pas "entièrement" le cas.
- Je suis traumatisée par des films tout à fait banals
(prout "banaux" c'est le pluriel de "banal", qui appartient au ban, dans le monde féodal) encore maintenant : en allant voir Blood Diamonds au cinéma avec des copains, je me suis mise à pleurer à chaudes larmes, gémissant : "si c'est comme ça tout le film et bah moi je m'en vais". De même, pour Gangs of New York que j'ai regardé en famille, chez moi : l'une des premières scènes montre un combat de rue, combat dans lequel une femme arrache l'oreille d'un homme avec ses dents. Il ne m'en a pas fallu plus pour que je me mette à hurler en disant "interdit aux moins de 12 ans bien sûr !" avant de claquer la porte et de me coucher, sanglotant et tenant mon oreille pour pouvoir m'endormir.
Cela peut paraître bête, mais même un épisode de NCIS, où l'on laisse entrevoir le torse béant de la victime autopsiée me donne des hauts le coeurs et des maux difficilement supportables. Il m'est même arrivé de vomir devant un tour de magie (!) et régulièrement je presse la partie du corps dont le personnage/la personne devant moi souffre.
Bien sûr je n'ai jamais aussi mal que la personne elle-même (d'autant plus lorsqu'il s'agit d'acteurs ou de prestidigitateurs

) mais tout de même... Alors, évidemment je me suis également adaptée au fil du temps. Quand je sens poindre ce genre de scènes, je détourne juste les yeux, le temps qu'elle passe et que mes sens ne s'affolent pas inutilement.
Mais qu'on se le dise, ce n'est pas juste que je me mette à la place de l'autre, je ressens REELEMENT une douleur en/sur moi.
- Dans les transports je prends énormément sur moi, tout d'abord parce que je ne supporte pas ça, mais aussi parce que les émotions et les perceptions m'arrivent dans la tronche de plein fouet. Une femme pleure mes yeux s'emplissent de larmes, tandis que ma peau me démange parce que son voisin se gratte le bras depuis 5min.
A présent je gère mieux ces épisodes où je me détache de moi même, où je me projette. Ma psychométricienne m'a appris divers techniques et exercices à effectuer quotidiennement, mais aussi à l'instant où s'opère cet espèce de transfert. Cela ne fait rien disparaitre, mais ça m'apaise, ça diminue nettement ce que je peux ressentir.
Exemples mis à part on me dit souvent, lorsque j'évoque la chose : "ben dis-donc, regarde pas de porno toi

"
Ils ne croient pas si bien dire...