Stratagèmes, manigances et machiavélisme des plantes

[Rooted]

Par une promenade printanière, l'observation d'une orchidée m'a laissée dubitative quand au possible scénario de sa reproduction : le passage semblait étroit pour un insecte et je ne voyais pas bien comment pouvait se produire la pollinisation. Une photo chargée dans plantnet m'apprend qu'il s'agit d'un serapia vomicera ( http://www.elisajeanluc.fr/orchidees_na ... eracea.htm ).

Une recherche web me renseigne sur l'existence du labelle qui est un pétale particulier des orchidées imitant la forme d'un insecte et exhalant un parfum irrésistible de phéromone ! Ainsi la fleur n'offre pas de nectar en échange du transport de ses semences mais a mis au point un piège sexuel. En approche de la fleur, l'insecte mâle pense avoir repéré une femelle : il se pose sur le labelle pour une copulation passionnée et repartira avec des petites boules... ( https://www.salamandre.org/article/les- ... eproduire/ )

Les plantes aussi se sont adaptées et ont évoluées jusqu'à s'adapter à leur environnement de façon tout à fait surprenante. Ne pouvant pas se déplacer pour rencontrer l'amour, elles utilisent ce qu'elles ont à disposition : le vent, les insectes, la production de stratagèmes. L'étude de leur reproduction offre bien des surprises !

Mais leur capacité d'adaptation ne s'arrête pas là, la nourriture est aussi une quête pour sa propre survie et parfois le milieu les pousse à avaler insectes et autres : https://www.caminteresse.fr/nature/les- ... -11132101/

Si vous connaissez d'autres machiavélismes chez les plantes...
De plus, si quelqu'un sait où trouver l'origine de leurs évolutions..

[Le Renard]

Y'a pas longtemps, une amie m'avait fait remarquer qu'au milieu des fleurs de carottes, il y a ce petit machin rouge qui ressemble vaguement à une mini coccinelle.
Paraît-il que c'est comme les canards en plastique sur les étangs, qui attirent les vrais canards. Ca fait croire aux autres insectes que quelqu'un s'intéresse déjà à la fleur, et qu'il faut vite venir passer à table.

[Mindblender]

Intéressant... Quand je marche dans les sous-bois, je regarde toutes ces plantes, ces arbres qui semblent immobiles, mais qui, en réalité, se livrent à une guerre acharnée de territoire et d'accès à la lumière. Les branches du bas ne sont plus alimentées car elles n'ont plus accès aux rayons directs du soleil, la sève est orientée vers les branches du haut qui se développent pour produire des feuilles qui vont pouvoir recevoir des rayons du soleil pour la photosynthèse. Ce sont les plantes les plus débrouillardes qui s'en sortent.

[Ivanovic]

La vie des arbres est également passionnante. Pêle-mêle:

• Les arbres vivent en famille puis en communauté.
• Les hêtres, les chênes, les acacias &co ne feront jamais pousser une branche trop épaisse vers un membre de la même famille.
• Après que les glands soient tombés sur le sol et commence à germer, l'arbre parent va immédiatement chercher à connecter ses racines à ses enfants. Il décidera ensuite de qui doit survivre et quand il peut pousser en fonction de son emplacement dans la communauté.
• Si un animal grignote une feuille d'arbre, ce dernier va produire un acide augmentant le tanin, dissuasif pour les animaux, et prévenier ses voisins qui vont faire de même par prévention.
• Plusieurs familles d'arbres peuvent coopérer, comme dans les forêts landaises, lorsque c'est nécessaire.
• Un arbre ne se reproduira pas régulièrement si des animaux sont susceptibles de manger les graines ou les glands. Cela évite que les animaux prennent leurs habitudes et empêchent systématiquement toute reproduction.
• Les racines des plantes et des arbres sont dotées d'une intelligence qui fascine les neuroscientifiques. Chaque tête de racine peut s'orienter dans l'espace, goûter, manger, se connecter ou envoyer divers signaux. Tout comme pour le blob, cela repousse les limites de l'intelligence définies par l'homme.
• Beaucoup d'autres choses sont en-cours d'étude comme la nature des informations qui circulent dans l'arbre lui même ainsi que celles transmisent aux congénères.
• Les plantes disposent du sens de proprioception.
• Lorsqu'on coupe un arbre, si des congénères sont à proximité, ces derniers vont envoyer des racines vers cet arbre s'ils n'étaient pas déjà lié pour le nourrir et le maintenir en vie. Ainsi on a découvert que des souches d'arbre qui semblaient mortent vivaient depuis plusieurs décennies.

C'est fascinant de découvrir tant de choses là où on l'on ne voyait rien avant.

[Invité]

Merci pour cette discussion !
Quand je lis des ouvrages sur les plantes, je ressens le même vertige que quand je regarde les images représentant l'Univers. Plus j'en apprends, moins j'en sais.
J'aimais à une époque lire les ouvrages de Jean-Marie Pelt qui regorgent d'anecdotes à propos des coquineries des plantes. Si mes souvenirs sont bons La cannelle et le panda est un de ses livres croustillant à lire.

[TourneLune]

Je trouve le titre tellement hors de propos.... Comme si tout ceci était uniquement négatif. Le monde des plantes est riche et plein d'interactions mais les présenter sous cet angle péjoratif et belliqueux me gène profondément. Merci Ivanovic d'y remettre un peu d'équilibre, et encore, il y a énormément à dire.

[Pascalita]

Au sujet des arbres (et c'est peut-être une des sources d'Ivanovic dans son post ci-dessus), j'ai beaucoup apprécié La Vie secrète des arbres, de Peter Wohlleben. Ça ne correspond effectivement pas trop aux termes "machiavélisme" ou "manigances", un peu plus à "stratagèmes" peut-être... Je le recommande, autant pour les informations qu'il contient et la façon de les transmettre que pour la tendresse de l'auteur à l'égard du peuple immobile.

[Ivanovic]

j'ai beaucoup apprécié La Vie secrète des arbres, de Peter Wohlleben.

Effectivement, ce livre est passionnant. Et j'avais déjà beaucoup d'intérêt sur le sujet: les phytoncides, les réseaux d'information, la propioception ou encore l'intelligence des racines.

et encore, il y a énormément à dire.

Oh oui. On pourrait partir dans tellement de directions. Peut-être vaudrait-il mieux consacrer des sujets sur des points en particulier.

Ce que je trouve particulièrement intéressant est le rapprochement avec les neurosciences et notament la différenciation nécessaire entre l'intelligence implicite dans la nature et donc aussi en l'homme et l'intelligence explicite propre à l'humain. Ces termes sont souvents employés par Antonio Damasio et je trouve qu'ils sont bien choisis. Impliquant que la conscience, telle qu'elle est définie par Damasio, est propre à l'homme mais que l'ensemble de la nature même non vivante, comme les virus, possède une intelligence extraordinaire lui permettant de mettre en oeuvre des mécanismes allostasiques afin de maintenir leur homéostasie.