Oh mais pas de souci Luciole! Ton portrait est très réussi. J'aime beaucoup les ombres.
Et maintenant que je vois le tableau d'
@Holi , je me dis que c'est le moment que je poste.
#Bleu
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Elle progresse silencieusement, pénétrée par la fraicheur, saisie de quelques gouttes vivifiantes venues éclabousser son corps. Des rires éclatent à quelques mètres. Ses sens distinguent les sauts, les piétinements, les mains qui brassent le courant et le bruit sourd du ballon rebondissant à la surface. Elle hume les embruns salés chargés d’iode ; plus subtilement disséminée, une légère trace de souffre vient tapisser l’intimité de ses narines. Sa peau tressaillit au contact de textures inaccoutumées qui escortent ses jambes ; de longues herbes soyeuses et frétillantes viennent onduler autour de ses mollets. Elle dépose des poignées de pluie fraiche sur le ventre, les omoplates et les bras, tout en éternisant le glissement. Au loin, un cerf-volant bruisse. Une femme disparaît, entière, dans l’apesanteur tiède.
Allongée sur l’étendue endormie, elle s’abandonne et s’ancre confiante, accompagnant les bercements réguliers, portée par l’évanescente poussée. Dans l’instant, l’eau est calme et son épiderme fusionne au contact de l’élément. L’océan gronde des phrases sourdes et cadencées. Elle les sent défiler là-haut, les nuages déposent pour quelques secondes, le temps d’un frissonnement, leurs singulières ombres froides ; ils sont de passage et lorsqu’ils quittent le cadre, la chaleur suave réinvestit le présent.
Presque imperceptiblement, les mouvements s’allongent, au loin se détache un aboiement, et la marée change. Elle perçoit une accélération de rythme, l’intensification des oscillations et le courant qui l’entraine. Derrière, elle entend les voix étouffées de l’écume. Tournée vers l’horizon, une femme se laisse dériver à bâbord.
Face aux profondeurs incommensurables, elle se découvre happée par l’angoisse de l’aspiration. Devinant la main qui pourrait la saisir, l’attirant vers les abîmes, elle éprouve le vertige de la lame de fond et elle pâlit. Juste au-dessus, un cri rauque attire son attention, une mouette rieuse interprète ses terreurs dormantes. Instinctivement, sa silhouette plonge et traverse l’épaisseur menaçante. S’ensuit le contact avec le silence mat ; immergée dans un flot ouaté, elle sonde ses propres battements. Délestée de la sensation d’oppression, elle frôle les pulsations narcotiques des abysses relaxantes. Dans la volupté de l’expérience une femme exalte, ses paupières se détachent et elle embrasse les fonds.