Platon vs. Kant : qu'est-ce qu'être quelqu'un de bien?

l'Humanité, L'Existence, la Métaphysique, la Guerre, la Religion, le Bien, le Mal, la Morale, le Monde, l'Etre, le Non-Etre... Pourquoi, Comment, Qui, Que, Quoi, Dont, Où...?
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Boby
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Re: Platon vs. Kant : qu'est-ce qu'être quelqu'un de bien?

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Euthyphron
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Re: Platon vs. Kant : qu'est-ce qu'être quelqu'un de bien?

Message par Euthyphron »

ZeBrebis a écrit :J'admets que selon Kant la morale voudrait que tout homicide soit puni de mort.
Comme c'était l'objet de la controverse, cela veut dire que nous sommes maintenant d'accord. :occasion14:
ZeBrebis a écrit :Mais je garde la divergence sur le corps du problème : pour moi Kant admet les actes en question au regard du fait que la législation ne peut leur permettre une solution honorable ; il reconnaît à l'honneur un poids tel qu'il trouve que c'est bel et bien un dilemme que de savoir s' il faut effacer l'acte ou le concept d'honneur lors du jugement.
Oui, c'est exact, mais c'est un dilemme juridique et non un dilemme moral. Sur le plan moral il n'y aucune difficulté, aucune hésitation. Mais ici Kant écrit une Doctrine du Droit. Or, le droit est contraint de prendre en compte les réalités sociales existantes, tout en ayant en vue la parfaite moralité. Le dilemme vient de là. C'est pourquoi le droit évolue.
ZeBrebis a écrit :En poussant les hommes (et femmes) à la faute morale, c'est donc la législation (barbare et inculte) qui empêche la moralité et on ne peut punir ces individus au regard de la morale sauf à commettre l'injustice. Je comprends que les individus criminels ne peuvent pas être reconnus comme pleinement responsables ici.
C'est effectivement une circonstance atténuante, qui ne va pas cependant jusqu'à la suppression de toute responsabilité.
ZeBrebis a écrit :Bref, pour moi il ne donne aucun point de vue opposé au sien dans ce passage, c'est simplement que pour lui ce sont des cas limite.
Oui, si tu veux. Ce sont très exactement des cas de figure où s'opposent la morale universelle et le conformisme social, celui-ci étant réglé sur l'honneur. Cette opposition se manifeste ainsi : le crime est commis comme s'il était obligatoire, comme si ne pas le commettre était une faute déshonorante (et non par simple recherche de son intérêt personnel). Or, Kant combat effectivement cette parodie de la moralité qu'est le conformisme, mais voit bien que le cas n'est pas identique à celui du crime par intérêt.
ZeBrebis a écrit :(Punaise, je suis plus à l'aise avec les mathématiques. Pas d'interprétation, le vrai est indiscutable...Je suis désolée d'insister autant, je crois que je suis têtue comme une bourrique :wasntme: )
C'est-à-dire qu'en mathématiques se tromper est disqualifiant, alors qu'en philosophie l'erreur est un tremplin, car la situation de l'homme est, comme dirait Platon, celle de prisonniers enchaînés dans une caverne et ignorant des vraies réalités.
Je n'ai pas l'intention de t'appeler ZeBourrique pour autant, au contraire, à quelques mouvements d'impatience près, et encore, cette discussion est un plaisir! :*

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Re: Platon vs. Kant : qu'est-ce qu'être quelqu'un de bien?

Message par emmanuelle47 »

et Platon? :-)
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ZeBrebis
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Re: Platon vs. Kant : qu'est-ce qu'être quelqu'un de bien?

Message par ZeBrebis »

La controverse me semblait plutôt concerner le fait que la citation donnée était de ses idées. Et je comprends d'ailleurs mieux cette citation car il y juge que l'infanticide de l'enfant né hors mariage, hors la loi, n'enlève rien à l'Etat.
C'est donc bien de lui, mais c'est surtout un tout autre mode de pensée que le nôtre où l'individu est central, la nation l'entourant mais n'en étant nullement propriétaire (quoiqu' elle dispose du pouvoir de punir et de taxer ledit individu selon les règles de la législation et donc dispose dans un certain sens de son corps et de ses biens).

J'aimerais te demander pourquoi selon toi Kant considère qu'il y a dilemme ? Car il ne plaide pas pour appliquer la peine de mort à ces homicides, il ne peste pas contre le peuple non plus.
Il disqualifie la législation, à ce que j'ai compris parce qu'elle s' avère incapable de répondre au besoin (qu'il semble estimer fondamental) d'honneur et qu'elle abandonne les protagonistes dans un état de nature pour tenter de le conserver. C'est bien la législation qu'il estime défaillante, en raison de quoi il doit considérer qu'elle ne peut punir en appliquant stricto sensu la morale aux actes en lien avec cette défaillance.

De tout cela je retiendrai deux choses : en effet, Kant semble chercher des lois morales comme il y a des lois physiques, auxquelles les Hommes sont soumis. Et deuxièmement j'avoue avoir du mal à comprendre, sauf curiosité historique, pourquoi on étudie des systèmes reposant sur des postulats complètement étrangers aux postulats actuels.
Pour moi cela reviendrait à etudier en profondeur la phlogistique...

Mais c'est gentil d'avoir été patient. Je suis juste déçue de ce que j'ai -difficilement- compris...

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Boby
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Re: Platon vs. Kant : qu'est-ce qu'être quelqu'un de bien?

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Euthyphron
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Re: Platon vs. Kant : qu'est-ce qu'être quelqu'un de bien?

Message par Euthyphron »

Ah, Platon!
Kant est pénible à lire mais très précis, il correspond (hélas!) :( à l'idée que se font généralement de la philosophie ceux qui sont passés à côté, à savoir une espèce de science portant sur des sujets non scientifiques.
Platon , c'est tout l'inverse. Il n'a pas écrit de traité, mais des dialogues, pour la plupart agréables à lire. Il n'y a pas de système platonicien. Si l'on en voit la trace ici ou là, il faut se rappeler que c'est du reconstitué, et tout le monde ne reconstitue pas le même, loin de là. Donc, je ne peux pas expliquer "la philosophie de Platon", puisque je dis qu'en réalité cela n'existe pas. Mais je vais essayer de réfléchir avec ceux qui le souhaitent sur ce que la manière de philosopher qui est celle de Platon peut nous apprendre.
Je rappelle la question d'origine : qu'est-ce que quelqu'un de bien? pour Kant, c'est quelqu'un qui fait effort pour que sa volonté soit en accord avec ce qu'elle sait être sa norme, en résistant aux penchants égoïstes.
Mais comme le montre Platon (via Socrate, qui est en fait généralement son porte-parole dans les dialogues), c'est que nous voulons tous le bien. J'ai essayé d'expliquer ceci dans mon post initial. Ce qui distingue quelqu'un de bien n'est donc pas qu'il veut le bien, mais qu'il agisse en vue du vrai bien, alors que la plupart des hommes, si ce n'est tous, sont dans l'illusion.
En effet, nous constatons des apparences. C'est cela, une apparence, c'est quelque chose qui apparaît, et qui apparaît, bien sûr, comme réelle. Et de fait une apparence montre bien quelque chose du réel, mais le cache en même temps. Disons qu'il faut apprendre à la lire. Ainsi le plaisir, qui est l'apparence du bien, est bon, mais n'est pas le bien, comme la moindre crise de foie suffit à le prouver.
La situation normale de l'homme est donc d'être prisonnier des apparences, ignorants du sens véritable des choses. Ce n'est pas grave, puisque c'est normal. Mais ce qui est grave est d'ignorer sa propre ignorance. Cela peut se dire aussi, cela revient au même, croire qu'on sait alors qu'on ne sait pas. Ce qui, si vous avez suivi, est presque toujours le cas dès qu'on croit savoir (puisqu'en réalité on ne sait pas!).
Le drame de l'ignorance qui s'ignore, c'est qu'elle n'est pas prête à accueillir la vérité. Non seulement elle n'en ressent pas le besoin, puisqu'elle croit savoir, mais de plus lorsque la vérité se présente elle n'est pas disposée à l'accueillir, elle la rejette comme dérangeante, et voilà pourquoi, si on me permet ce raccourci, Socrate est mort.
Il s'ensuit deux conséquences pratiques : la première est que nous n'avons autre chose à faire pour nous améliorer que rechercher la vérité, la seconde est que pour la découvrir nous aurons besoin que notre ignorance de l'ignorance soit détruite, et donc il faudra qu'apparaisse un problème, une raison de ne pas en rester là où l'on s'était installé.
Ce programme s'appelle philosophie.

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ZeBrebis
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Re: Platon vs. Kant : qu'est-ce qu'être quelqu'un de bien?

Message par ZeBrebis »

Euthyphron a écrit : Mais comme le montre Platon (via Socrate, qui est en fait généralement son porte-parole dans les dialogues), c'est que nous voulons tous le bien. J'ai essayé d'expliquer ceci dans mon post initial. Ce qui distingue quelqu'un de bien n'est donc pas qu'il veut le bien, mais qu'il agisse en vue du vrai bien, alors que la plupart des hommes, si ce n'est tous, sont dans l'illusion.
En effet, nous constatons des apparences. C'est cela, une apparence, c'est quelque chose qui apparaît, et qui apparaît, bien sûr, comme réelle. Et de fait une apparence montre bien quelque chose du réel, mais le cache en même temps. Disons qu'il faut apprendre à la lire. Ainsi le plaisir, qui est l'apparence du bien, est bon, mais n'est pas le bien, comme la moindre crise de foie suffit à le prouver.
La situation normale de l'homme est donc d'être prisonnier des apparences, ignorants du sens véritable des choses. Ce n'est pas grave, puisque c'est normal. Mais ce qui est grave est d'ignorer sa propre ignorance. Cela peut se dire aussi, cela revient au même, croire qu'on sait alors qu'on ne sait pas. Ce qui, si vous avez suivi, est presque toujours le cas dès qu'on croit savoir (puisqu'en réalité on ne sait pas!).
Le drame de l'ignorance qui s'ignore, c'est qu'elle n'est pas prête à accueillir la vérité. Non seulement elle n'en ressent pas le besoin, puisqu'elle croit savoir, mais de plus lorsque la vérité se présente elle n'est pas disposée à l'accueillir, elle la rejette comme dérangeante, et voilà pourquoi, si on me permet ce raccourci, Socrate est mort.
Il s'ensuit deux conséquences pratiques : la première est que nous n'avons autre chose à faire pour nous améliorer que rechercher la vérité, la seconde est que pour la découvrir nous aurons besoin que notre ignorance de l'ignorance soit détruite, et donc il faudra qu'apparaisse un problème, une raison de ne pas en rester là où l'on s'était installé.
Ce programme s'appelle philosophie.
Si je peux oser une question...
"lorsque la vérité se présente elle n'est pas disposée à l'accueillir, elle la rejette comme dérangeante, et voilà pourquoi, si on me permet ce raccourci, Socrate est mort. " -> Serait ce aussi comme cela que Dieu est mort ? ;)

Je suis d'accord avec ton constat, j'aimerais simplement interroger l'idée de "chercher la vérité". En cherchant, ne prenons nous pas la direction qui nous semble la plus engageante, et ne nous exposons nous donc pas à trouver surtout des illusions, et d'autant plus tenaces qu'elles forment alors un réseau avec nos autres convictions ?
Plutôt que de parler de la recherche (qui est sans doute incontournable dans une vie d'Homme, étant d'une espèce cherchant des explications), je pense qu'il est bon de mettre en valeur les garde-fou que sont l'expérimentation et l'honnêteté intellectuelle.

Je ne connais rien de plus difficile que de se forcer à enlever ses oeillères. Même en ayant conscience du fait que notre champ de vision est limité, il est compliqué de s' avouer qu'on ne voit pas forcément la véritable nature des choses. On accepte d'ignorer mais pas de se tromper, alors même qu'ignorer des paramètres extérieurs mène justement à se tromper sur ce qu'on croyait bien voir.

Pour qu'on puisse pleinement remettre en question il faut être capable de tester dans le but de mettre à l'épreuve nos théories et de ne pas biaiser les conclusions d'une expérience. Ce n'est déjà pas évident pour des scientifiques qui ont mis une théorie sur pied, mais quand on le fait sur ce qui est toute notre vision du monde je pense qu'on mérite des lauriers.
Je n'ai pour ma part réussi à réagir qu'à force d'experiences récurrentes montrant de manière flagrante que cela n'allait pas jusque là, comme tu l'évoques Euthyphron.
Mais j'ai bon espoir que cela me serve d'expérience pour pouvoir provoquer plus rapidement ces prises de conscience à l'avenir voire à terme de tester la solidité de mes convictions.

Ces considérations me font penser à Khun et à son livre La structure des révolutions scientifiques. Un changement de paradigme se fait en plusieurs vagues entre les initiateurs ayant mis à mal la théorie installée et ceux qui ont fondé leur carrière sur ladite théorie. Avant d'être acceptée de manière générale toutes les possibilités pour raccrocher à la théorie installée sont étudiées. C'est une question de sauvegarde.

Bon, je digresse, je dis rien, je dis bonsoir à tous et bonne nuit donc. :hai:

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Euthyphron
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Re: Platon vs. Kant : qu'est-ce qu'être quelqu'un de bien?

Message par Euthyphron »

ZeBrebis a écrit : Si je peux oser une question...
"lorsque la vérité se présente elle n'est pas disposée à l'accueillir, elle la rejette comme dérangeante, et voilà pourquoi, si on me permet ce raccourci, Socrate est mort. " -> Serait ce aussi comme cela que Dieu est mort ? ;)
En général, quand on parle de la mort de Dieu, c'est pour évoquer la profonde mutation culturelle qui a affecté l'occident. Peut-on y voir une analogie avec la mort de Socrate, condamné à mort pour impiété et corruption de la jeunesse? Dieu est-il mort condamné pour les mêmes motifs? La piste est intéressante, au moins pour un ouvrage d'imagination, mais je ne vais pas tenter de l'écrire!
ZeBrebis a écrit :Je suis d'accord avec ton constat, j'aimerais simplement interroger l'idée de "chercher la vérité". En cherchant, ne prenons nous pas la direction qui nous semble la plus engageante, et ne nous exposons nous donc pas à trouver surtout des illusions, et d'autant plus tenaces qu'elles forment alors un réseau avec nos autres convictions ?
Tout à fait. C'est pourquoi, un homme averti en valant deux, il faut prendre l'autre direction.
ZeBrebis a écrit :Je ne connais rien de plus difficile que de se forcer à enlever ses oeillères. Même en ayant conscience du fait que notre champ de vision est limité, il est compliqué de s' avouer qu'on ne voit pas forcément la véritable nature des choses. On accepte d'ignorer mais pas de se tromper, alors même qu'ignorer des paramètres extérieurs mène justement à se tromper sur ce qu'on croyait bien voir.
Oui. C'est pourquoi il faut un dialogue. La confrontation avec le réel seul ne suffit pas, car rien de plus tentant que de plier l'expérience aux leçons que l'on a envie d'en tirer. La confrontation avec autrui a un mérite supplémentaire, autrui, tel que je le connais ;) , ne se laisse pas faire, et on ne peut lui dire des sottises impunément.
ZeBrebis a écrit :Ces considérations me font penser à Khun et à son livre La structure des révolutions scientifiques. Un changement de paradigme se fait en plusieurs vagues entre les initiateurs ayant mis à mal la théorie installée et ceux qui ont fondé leur carrière sur ladite théorie. Avant d'être acceptée de manière générale toutes les possibilités pour raccrocher à la théorie installée sont étudiées. C'est une question de sauvegarde.
Je trouve aussi que les thèses de Thomas Kuhn sont fondamentales, même si je me suis beaucoup ennuyé à le lire mais bon, l'ennui fait partie du charme de l'étude paraît-il! :lol:

helix

Re: Platon vs. Kant : qu'est-ce qu'être quelqu'un de bien?

Message par helix »

Merci beaucoup pour ce fil que je trouve passionnant. Je n'ai que peu de connaissances en philosophie, mais je m'y suis intéressée récemment en commençant à suivre les cours vidéo de Bernard Stiegler sur internet. Grâce à eux, j'ai notamment commencé à lire les dialogues socratiques, qui sont vraiment lisibles et amusants : le Socrate de Platon ne manquait vraiment pas d'humour, outre l'acuité de son sens du questionnement.

Alors bien sûr la question du début m'a rappelé le "Qu'est-ce que la vertu ?" du dialogue Ménon. (Je passe sur la "clausule zazique" que Stiegler y décèle et qui rend bien compte de l'irrévérence de Socrate :-) )

Et puis aussi, j'ai lu l'Ethique de Spinoza, qui m'a enthousiasmée par son approche complètement originale réfutant toute notion de libre-arbitre et définissant la vertu comme la conservation de ce qui est bien pour l'être (si j'ai bien compris), mais subordonnant la recherche de la vérité/liberté à celle de la connaissance de nos contraintes. Comment le situeriez-vous par rapport à Platon et Kant (que je ne connais pas) ?

Par ailleurs (hors-topic, mais ça m'intéresse énormément), si j'adore les dialogues socratiques et le Banquet, je ne suis pas du tout d'accord avec l'approche platonicienne ou essentialisme (la caverne), dont je pense que c'est une réification des processus de catégorisation de la pensée. Or les catégories n'existent pas en tant qu'objets, ce ne sont que des mises à plat des caractères des objets selon un ou deux, dans le meilleur des cas un nombre restreint, de leurs caractères. Et en plus, même sur ces plans simplifiés de projection (je fais le parallèle avec l'analyse factoriele multidimensionnelle), les contours des nuages d'objets que nous définissons comme catégories (comment parler du réel sans un vocabulaire ?), sont flous et à intersection non vide. Si c'est un sujet qui intéresse quelqu'un on peut peut-être ouvrir un nouveau fil là-dessus ?

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ZeBrebis
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Re: Platon vs. Kant : qu'est-ce qu'être quelqu'un de bien?

Message par ZeBrebis »

Euthyphron a écrit :
ZeBrebis a écrit : Si je peux oser une question...
"lorsque la vérité se présente elle n'est pas disposée à l'accueillir, elle la rejette comme dérangeante, et voilà pourquoi, si on me permet ce raccourci, Socrate est mort. " -> Serait ce aussi comme cela que Dieu est mort ? ;)
En général, quand on parle de la mort de Dieu, c'est pour évoquer la profonde mutation culturelle qui a affecté l'occident. Peut-on y voir une analogie avec la mort de Socrate, condamné à mort pour impiété et corruption de la jeunesse? Dieu est-il mort condamné pour les mêmes motifs? La piste est intéressante, au moins pour un ouvrage d'imagination, mais je ne vais pas tenter de l'écrire!
Dieu étant celui qui détient et révèle la Vérité lorsqu'il communique aux Hommes, le clin d'oeil me semblait adapté. :-)
Je pensais à Nietzsche évidemment.

Dieu est mort et alors l'Homme se construit seul ; il s' auto détermine et fait l'exercice de sa liberté plutôt que de recevoir ses normes d'une transcendance.
L'Homme a tué Dieu pour ne plus avoir de Vérité...mais il peut encore penser des vérités cependant.

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Re: Platon vs. Kant : qu'est-ce qu'être quelqu'un de bien?

Message par Euthyphron »

ZeBrebis,
je crois que j'avais compris ce à quoi tu pensais en évoquant la mort de Dieu, j'ai un peu répondu à côté mais pour rester dans le sujet. Sinon, avec ce que tu dis de la liberté, il va falloir engager, en plus de Nietzsche, Jean-Paul Sartre, et déjà qu'avec deux philosophes seulement on a du mal à se souvenir de quoi l'on parle! :D
helix,
même chose pour Spinoza, j'ai peur que si on l'invite on ne s'y retrouve plus. Ton résumé de sa pensée me paraît tout à fait exact.
Je n'ai pas bien compris ce que tu dis à la fin, mais je pense ne pas être d'accord avec ton interprétation de Platon.

helix

Re: Platon vs. Kant : qu'est-ce qu'être quelqu'un de bien?

Message par helix »

Oui, mon dernier paragraphe mériterait un plus long développement qui n'est pas trop à sa place dans ce fil (c'est une vision du monde en termes de diversités et dispersions (au sens mathématique du terme), plutôt qu'en termes d'essences.

C'est dommage pour Spinoza, parce que ça reste complètement dans le sujet je trouve. Et puis je suis assez fan de lui, faut dire.

Pour Platon, tu n'es pas d'accord pour dire que l'essence est une réification des processus de catégorisation ? Comment caractériserais-tu cette notion d'essence ?

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Re: Platon vs. Kant : qu'est-ce qu'être quelqu'un de bien?

Message par Pier Kirool »

Vous n’avez qu’à faire : « Sartre vs Spinoza (et autres), liberté ou déterminisme ? » :devil:
"La vraie science est une ignorance qui se sait" (Voltaire)

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Re: Platon vs. Kant : qu'est-ce qu'être quelqu'un de bien?

Message par Euthyphron »

Helix,
je veux bien que tu parles de Spinoza,et je souhaite que chaque personne intervenant se sente à l'aise et libre de ses références, mais si pour Kant et Platon, ayant pris l'initiative, je suis normalement dans le rôle de l'interrogé, en revanche pour ce qui ne vient pas de moi je préfère écouter ce que les autres veulent en dire et au besoin les questionner. C'est une question de protocole de discussion dirais-je, cela ne veut pas poser d'interdits.
Le mot "essence "est à "être" ce que "apparence" est à "apparaître". Soit par exemple la question "qu'est-ce que le beau?" (posée dans l'Hippias majeur"). Ce que l'on cherche, ce n'est pas tel ou tel exemple de beauté, mais ce qui fait que les belles choses sont belles. L'essence est donc ce dont les apparences sont le signe. Rien ne dit qu'elle doit être une "chose". Le dialogue que j'ai pris en exemple se termine d'ailleurs sans définir le beau, car l'essence ne saurait être enfermée dans les limites d'une définition.
Pier Kirool,
c'est une très bonne idée, mais qui va s'y coller? :think:

helix

Re: Platon vs. Kant : qu'est-ce qu'être quelqu'un de bien?

Message par helix »

Je suis d'accord pour la non-limitation dans une définition, même pour des "choses" à première vue beaucoup moins indéfinissables que le beau. Ce que je veux dire, c'est qu'en l'appelant essence et en faisant des choses la projection de l'ombre de leur essence, Platon en fait de facto une chose, au lieu de s'interroger sur ce qui préside à la conceptualisation et au vocabulaire, au fonctionnement matériel de la pensée par corrélations intégrées (sur plusieurs propriétés).

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Re: Platon vs. Kant : qu'est-ce qu'être quelqu'un de bien?

Message par Euthyphron »

Platon ne s'intéresse pas "au fonctionnement matériel de la pensée" c'est entendu. Mais je ne vois en quoi cette petite imperfection bien pardonnable pour un Grec ancien entraînerait une série d'erreurs.
J'ai peur que tu projettes sur Platon un débat contemporain dont j'ignore les tenants et les aboutissants.
Les essences sont des réalités, d'accord, et pour la raison que tu as dite. Mais pourquoi des choses?
Mais peut-être pourrais-tu ouvrir un autre fil où tu nous en dirais plus sur les processus de conceptualisation?

helix

Re: Platon vs. Kant : qu'est-ce qu'être quelqu'un de bien?

Message par helix »

oui, je vais tâcher de faire ça, mais ça va me demander un peu de temps qu'il faut que je trouve.

Ça n'entraîne pas une série d'erreurs, mais ça arrête la réflexion sur un mot perçu comme une réalité, je trouve.

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Re: Platon vs. Kant : qu'est-ce qu'être quelqu'un de bien?

Message par ZeBrebis »

Ne serait-ce pas un problème de classification entre objectif et subjectif ?
Si on parle d'une essence qui se projette, cela implique que l'essence existe objectivement, sans regard porté sur les choses, sans pensée pour interpréter. Et dans le même temps, si je comprends bien, ce serait assimilable par l'humain sinon on ne pourrait en discuter, tout au plus on parlerait de notre interprétation de l'essence, qu'on saurait partielle et partiale.

Si on parle maintenant catégorisation, c'est une interprétation toute humaine qui se projette sur le monde. Elle est construction, relative à nous. Elle est "idée de la chose" qu'on s' est faite et en débattre aurait la même fonction que dans tout débat d'idée, c'est à dire enrichir mutuellement nos conceptualisations, dans la limite de ce que l'humain peut produire et pour dépeindre au plus proche les impressions qui se font en nous.

On peut se demander si ce qui est évident pour un chien, par exemple l'odeur de la pâquerette, entrera dans notre essence de pâquerette. Je pense que non, qu'on s' interessera plus volontiers aux formes et couleurs, voire au toucher, et qu'on oubliera même qu'elle a potentiellement une odeur (qu'on ne capte pas franchement).
J'aurais pu choisir l'odeur de la cocaïne pour l'exemple, que cela évoque moins les odeurs de fleurs :lol:

Mais je parle à partir de ce que vous en dites et de très lointains échos de mes cours de terminale (scientifique qui plus est).

Pour Sartre, ne me tente pas Euthyphron, je n'ai pas lu sa philosophie mais j'ai un sérieux béguin pour lui depuis que j'ai lu ses romans, ses nouvelles, son théâtre. Et un jour je m'y lancerai...Quand je me sentirai à la hauteur pour interpréter sa pensée
:l:

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Re: Platon vs. Kant : qu'est-ce qu'être quelqu'un de bien?

Message par Ucralo »

Je reviens au sujet de la page 1 :
Dans l'éducation, sur quoi faut-il insister ? Plutôt sur la bonne volonté ou bien plutôt sur l'intelligence ?

Je le reformule ainsi :
Dans l'éducation, sur quoi faut-il faire le plus d'effort ? Amener les gens à choisir les actes qu'ils qualifient de "biens" ou bien amener les gens à qualifier de "bien" ce qui est réellement bien ?
Rq : Je précise que je rejette sans hésitation l'idée selon laquelle les gens choisiraient toujours ce qu'ils qualifient de "bien".

Je dirais que la réponse dépend de qui on éduque.

Par exemple, un riche n'aura généralement pas de difficulté à qualifier de "bien" la générosité envers les pauvres. Mais il est peu probable qu'il soit généreux. Dans ce cas, je pense qu'il est plus important :
-de l'amener à choisir les actes qu'il qualifie de "biens" (donc à être généreux)
-que de l'amener à qualifier de "bien" ce qui est réellement bien (donc à savoir vers qui orienter les dons pour être un bienfaiteur efficace).
Sinon, il saura à qui il faudrait donner de l'argent pour être un bienfaiteur efficace... mais ne donnera rien. :P
Rq : Je n'ai pas pris l'exemple du riche pour sous-entendre que les riches sont plus radins que les autres, mais parce que rendre généreux quelqu'un a plus d'impact si ce dernier est riche.

Dans les autres cas, je n'ai pas de réponse précise.

Un exemple qui me vient en tête est la politique. Est-il plus important d'amener les électeurs à encourager la politique qu'ils considèrent comme la meilleure sur le plan moral (plutôt que celle qu'ils considèrent comme la meilleure pour leurs intérêts personnels) ou plutôt de les amener à savoir quelle serait la meilleure politique sur le plan moral ? Je ne sais pas trop.

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Boby
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Re: Platon vs. Kant : qu'est-ce qu'être quelqu'un de bien?

Message par Boby »

En effet, nous constatons des apparences. C'est cela, une apparence, c'est quelque chose qui apparaît, et qui apparaît, bien sûr, comme réelle. Et de fait une apparence montre bien quelque chose du réel, mais le cache en même temps. Disons qu'il faut apprendre à la lire. Ainsi le plaisir, qui est l'apparence du bien, est bon, mais n'est pas le bien, comme la moindre crise de foie suffit à le prouver.
La situation normale de l'homme est donc d'être prisonnier des apparences, ignorants du sens véritable des choses. Ce n'est pas grave, puisque c'est normal. Mais ce qui est grave est d'ignorer sa propre ignorance. Cela peut se dire aussi, cela revient au même, croire qu'on sait alors qu'on ne sait pas. Ce qui, si vous avez suivi, est presque toujours le cas dès qu'on croit savoir (puisqu'en réalité on ne sait pas!).
Le drame de l'ignorance qui s'ignore, c'est qu'elle n'est pas prête à accueillir la vérité. Non seulement elle n'en ressent pas le besoin, puisqu'elle croit savoir, mais de plus lorsque la vérité se présente elle n'est pas disposée à l'accueillir, elle la rejette comme dérangeante, et voilà pourquoi, si on me permet ce raccourci, Socrate est mort.
Il s'ensuit deux conséquences pratiques : la première est que nous n'avons autre chose à faire pour nous améliorer que rechercher la vérité, la seconde est que pour la découvrir nous aurons besoin que notre ignorance de l'ignorance soit détruite, et donc il faudra qu'apparaisse un problème, une raison de ne pas en rester là où l'on s'était installé.
Ce programme s'appelle philosophie.
Ah oui effectivement, c'est pas le même raisonnement...
Pele mele, à chaud ça me fait penser à :
Citation Socrate (paradoxe par ailleurs suivant le point de vue):
► Afficher le texte
Hagakure :
► Afficher le texte
Blague des jumeaux :
► Afficher le texte
Donc si j'ai correctement compris, pour trouver la voie le juste, tu dois te couper la tête il faut trouver la vérité qui nous permettra une meilleur compréhension de nos actes (et donc leurs conséquences) afin que la voie du juste soit au plus proche d'une définition absolue ( et pas relative au carcan de notre condition ?).
Mais dans le même temps, accepter l'impossibilité de cette tache :
Autrement dit, il faut rechercher sans fin la "vérité" puisqu'on ne pourra qu'y tendre sans jamais l'atteindre.
Là est la voie (de la recherche) du "juste" (de la "vérité") ?
Nous verrons cela... Destinée ... ou PAS !

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Euthyphron
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Re: Platon vs. Kant : qu'est-ce qu'être quelqu'un de bien?

Message par Euthyphron »

ZeBrebis,
il me semble que ce que tu as écrit explique et commente très bien ce qu'a dit helix, si j'ai bien compris. A vous deux de voir si vous dites bien la même chose.
Personnellement je ne saisis pas assez bien quelle est la question pour pouvoir en dire quelque chose qui me satisfasse. La catégorisation est un moment important de la recherche des essences. Ainsi la catégorie "stupéfiant" est utile pour comprendre la cocaïne. Et comme plusieurs catégorisations sont possibles, il faudra apprendre à distinguer ce qui est pertinent et ce qui ne l'est pas (j'espère que la catégorie "pertinence" est elle-même pertinente!). Ce n'est pas terrible, mais c'est tout ce que j'ai en stock pour l'instant! :D
Boby,
on peut lire Platon comme un maître spirituel. L'ennui est qu'on ignore ce qu'était "la religion de Platon", et pour le coup je ne suis pas sûr que la catégorie "religion" soit pertinente. Mais ta manière de résumer est parfaitement légitime, selon moi. Tu peux commencer les exercices au sabre laser.
Un petit mot sur "je sais que je ne sais rien". Platon rapporte que Socrate a employé ces mots pour commenter le verdict stupéfiant de la pythie de Delphes, selon lequel lui Socrate était le plus sage des hommes. Comment serait-ce possible, se dit Socrate, puisque je ne sais rien? L'enquête menée auprès d'hommes supposés savants révèlera le fond de l'affaire : Socrate est le plus sage car lui sait qu'il ne sait pas.
Ucralo,
je te remercie de te souvenir de la question initiale :-) !
Il me semble que la manière dont tu la poses présuppose que l'on sache quel est le bien. Ce n'est pas la même question si l'on présuppose que l'on l'ignore.
Partons donc de l'idée que l'on sache quel est le bien : faut-il éduquer à penser ou à agir?
Les deux sans doute, mais on peut (toujours dans l'hypothèse où l'on connaît le bien) admettre que plus c'est facile à faire et moins il y a besoin que l'éducation insiste sur l'action.
Je pense à l'exemple de la cigarette. Admettons que fumer est mauvais. Comment lutter contre ce fléau? En convaincant de la dangerosité du tabac, ou bien en renversant les jugements sociaux, de sorte que la honte change de camp, et passe chez le fumeur? Instruire ou conditionner?
Pour cet exemple, hélas sans doute, le plus efficace est de conditionner, la honte est plus dissuasive que la raison. Mais c'est tout simplement parce qu'il s'agit de combattre une addiction.

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Boby
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Re: Platon vs. Kant : qu'est-ce qu'être quelqu'un de bien?

Message par Boby »

et pour le coup je ne suis pas sûr que la catégorie "religion" soit pertinente.
Justement, la "religion" dans ce contexte est une façon (pour moi) de mettre des mots sur l'acceptation de notre condition limitée.
J'y vois un parallèle avec l'allégorie de la caverne.
On peut aussi se voir comme dans le film matrix : on cherche la pilule rouge de la vérité.
Enfermés dans la cage de notre ignorance, limités à notre perception du "réel" qui est aussi une projection...
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helix

Re: Platon vs. Kant : qu'est-ce qu'être quelqu'un de bien?

Message par helix »

Oui, ZeBrebis, y a pas mal de ça dans mon rejet de l'essentialisme comme création d'une méta-réalité qui n'en est pas une, mais il y a en plus la notion de diversité, une pensée de type "biologique" (au sens où la biologie s'intéresse aux populations et à la diversité, à la dispersion des objets au sein de la catégorie) Ça mérite sûrement d'être développé (dans un autre fil), mais ça va pas être pour aujourd'hui :nesaitpas:

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arizona
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Re: Platon vs. Kant : qu'est-ce qu'être quelqu'un de bien?

Message par arizona »

Ayant été absente assez longtemps, je n'avais pas lu ce topic. Merci à tous, et spécialement à l'initiateur ! Dommage qu'elle se soit arrêtée si vite. Kant a pas mal été discuté, mais au final, la question initiale, pas tant que ça.

Petite parenthèse : Dieu est arrivé dans la discussion, ( j'ai bien lu toutes les interventions, mais là précisément, je ne me souviens plus comment on y est arrivé ), mais je me suis dit ceci.
Si l'on ne connaît rien à la philosophie, ce qui est mon cas. Rien dans le post initial, dans la question qui a été posée, et dans les précisions qui ont suivi sur la morale de Kant, ne laisse supposer qu'il est croyant, et que son système de pensée le conduit inéluctablement à penser qu'il doit exister une morale en dehors de soi. Puisque Dieu est un point d'arrivée, et non de départ, et qu'il ne participe en rien à l'établissement du raisonnement et du système, il pourrait aisément être laissé de côté. Et aussi : Je ne crois pas à l'empathie. Oui, l'on peut reconnaitre la souffrance chez l'autre, et en souffrir. Mais pourquoi décider que c'est une valeur si élevée ? L'empathie peut nous faire prendre tout un tas de mauvaises décisions, si l'on décide d'agir. Peut nous inciter à sacrifier mille pour en sauver un. Parce que la souffrance de l'un peux être immédiatement soulagée, alors que celle des mille prendra plus de temps. Parce que ce un, c'est un être aimé, alors que les mille, on ne les connaît pas. Parce que l'empathie nous pousse à l'immédiateté, et que la réponse peut engendrer des problèmes encore plus grands. On croit bien faire, mais c'est un leurre.

Je ne comprends pas la question initiale dans le sens où pour moi, il n'y a pas antagonisme.

J'ai le sentiment, mais peut-être cela a déjà été dit, qu'il n'est pas possible de faire l'un sans l'autre. Il me paraît que la valeur morale est nécessaire lorsque l'intelligence est absente, et que l'intelligence est nécessaire pour développer les valeurs morales. Il faudrait donc que les deux puissent se développer en même temps, les valeurs morales découlant de ce que l'intelligence découvre au fur et à mesure. On pourrait sans doute me répondre que c'est déjà une valeur morale que de penser qu'il devrait y avoir, ou qu'il y a, qu'on le veuille ou non en nous, des valeurs morales. Et que donc, la balance penche déjà d'un côté, à savoir, si j'ai bien compris, du côté de Kant. Mais il me semble que la valeur morale sans intelligence n'est qu'un leurre, une parodie, une naïveté incroyable, puisque c'est soit faire confiance à l'autre, aux autres, pour déterminer ce que sont les valeurs morales, sans les remettre en cause, soit se faire suffisamment confiance à soi-même pour penser que ce qui est bon pour soi l'est aussi pour l'autre. Mais comment peut-on remettre en cause sans intelligence ?

L'exemple du train, dans ce sens, est révélateur. Voici la réponse d'Eutyphron : "Je crois savoir ce que Kant dirait. Tuer un homme est un crime. Ne pas pouvoir empêcher la mort de cinq hommes sans commettre de crime (ce que l'énoncé de ton problème impose) n'en est pas un. Donc, Kant dirait qu'il ne faut pas pousser le gros. "

Voilà pour moi la limite du système de Kant, et la nécessité de passer à autre chose : l'intelligence. La vie n'est pas un système, c'est beaucoup plus complexe. Appliquer des systèmes, c'est forcément, à un moment donné, prendre de mauvaises décisions. ( Attention, je crois que l'on prend le plus souvent des mauvaises décisions, mais c'est un autre sujet ). Utiliser l'intelligence me paraît beaucoup plus sûr, plus ouvert, plus constructif. Mais user de l'intelligence sans valeur morale, qu'en penser ?

( Voilà qui ne fait pas fort avancer le sujet :) )
Si nous n'étions pas d'ici, nous serions l'infini.
D'une chanson.

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Euthyphron
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Re: Platon vs. Kant : qu'est-ce qu'être quelqu'un de bien?

Message par Euthyphron »

arizona a écrit :Ayant été absente assez longtemps, je n'avais pas lu ce topic. Merci à tous, et spécialement à l'initiateur ! Dommage qu'elle se soit arrêtée si vite. Kant a pas mal été discuté, mais au final, la question initiale, pas tant que ça.
Je te remercie. Une question a plusieurs vies, comme les chats. Je suis d'accord avec toi pour dire que la morale de Kant a un peu étouffé la question initiale, mais ce n'est pas grave.
arizona a écrit :Si l'on ne connaît rien à la philosophie, ce qui est mon cas. Rien dans le post initial, dans la question qui a été posée, et dans les précisions qui ont suivi sur la morale de Kant, ne laisse supposer qu'il est croyant, et que son système de pensée le conduit inéluctablement à penser qu'il doit exister une morale en dehors de soi. Puisque Dieu est un point d'arrivée, et non de départ, et qu'il ne participe en rien à l'établissement du raisonnement et du système, il pourrait aisément être laissé de côté.
D'accord avec tout ce que tu dis, sauf sur la morale en dehors de soi, car c'est exactement tout le contraire, la morale kantienne est une morale de l'autonomie, pensée comme le respect de la loi en soi-même.
arizona a écrit : Et aussi : Je ne crois pas à l'empathie. Oui, l'on peut reconnaitre la souffrance chez l'autre, et en souffrir. Mais pourquoi décider que c'est une valeur si élevée ? L'empathie peut nous faire prendre tout un tas de mauvaises décisions, si l'on décide d'agir. Peut nous inciter à sacrifier mille pour en sauver un. Parce que la souffrance de l'un peux être immédiatement soulagée, alors que celle des mille prendra plus de temps. Parce que ce un, c'est un être aimé, alors que les mille, on ne les connaît pas. Parce que l'empathie nous pousse à l'immédiateté, et que la réponse peut engendrer des problèmes encore plus grands. On croit bien faire, mais c'est un leurre.
D'accord aussi. Lire tout ceci réjouirait notre ami Kant.
arizona a écrit :Je ne comprends pas la question initiale dans le sens où pour moi, il n'y a pas antagonisme.
Tu as tout à fait raison. Mais d'une part l'antagonisme véritable, il est entre moralisme et immoralisme, cela va de soi, et une discussion entre les deux me semblait courir le risque d'être convenue et de tourner court. D'autre part une différence n'est pas un antagonisme, mais suffit pour comparer et éventuellement choisir. Sans compter que des nuances qui semblent de détail peuvent masquer des antagonismes véritables cette fois et qui touchent au fond du problème.
arizona a écrit :J'ai le sentiment, mais peut-être cela a déjà été dit, qu'il n'est pas possible de faire l'un sans l'autre. Il me paraît que la valeur morale est nécessaire lorsque l'intelligence est absente, et que l'intelligence est nécessaire pour développer les valeurs morales. Il faudrait donc que les deux puissent se développer en même temps, les valeurs morales découlant de ce que l'intelligence découvre au fur et à mesure. On pourrait sans doute me répondre que c'est déjà une valeur morale que de penser qu'il devrait y avoir, ou qu'il y a, qu'on le veuille ou non en nous, des valeurs morales. Et que donc, la balance penche déjà d'un côté, à savoir, si j'ai bien compris, du côté de Kant. Mais il me semble que la valeur morale sans intelligence n'est qu'un leurre, une parodie, une naïveté incroyable, puisque c'est soit faire confiance à l'autre, aux autres, pour déterminer ce que sont les valeurs morales, sans les remettre en cause, soit se faire suffisamment confiance à soi-même pour penser que ce qui est bon pour soi l'est aussi pour l'autre. Mais comment peut-on remettre en cause sans intelligence ?
La question n'est donc pas de faire avec l'un sans l'autre. Mais de savoir quel est le meilleur modèle : l'homme de devoir ou le sage? Ou plus exactement, de savoir s'il faut être un homme de devoir pour devenir un sage ou commencer par chercher la sagesse pour devenir un homme juste. L'homme de devoir, ne l'oublions pas, se méfie du goût prononcé qu'a l'intelligence pour les raisonnements subtils. Quant au sage, qui sait par où il est passé pour devenir ce qu'il est, peut-on croire que ce soit simplement en obéissant bien à ses supérieurs légitimes?
arizona a écrit :L'exemple du train, dans ce sens, est révélateur. Voici la réponse d'Eutyphron : "Je crois savoir ce que Kant dirait. Tuer un homme est un crime. Ne pas pouvoir empêcher la mort de cinq hommes sans commettre de crime (ce que l'énoncé de ton problème impose) n'en est pas un. Donc, Kant dirait qu'il ne faut pas pousser le gros. "
Voilà pour moi la limite du système de Kant, et la nécessité de passer à autre chose : l'intelligence. La vie n'est pas un système, c'est beaucoup plus complexe. Appliquer des systèmes, c'est forcément, à un moment donné, prendre de mauvaises décisions. ( Attention, je crois que l'on prend le plus souvent des mauvaises décisions, mais c'est un autre sujet ). Utiliser l'intelligence me paraît beaucoup plus sûr, plus ouvert, plus constructif.
Je ne sais pas si systématiquement l'adoption d'un système nous conduit à nous tromper, mais il est certain qu'on peut contester le systématisme de Kant. Mais je n'ai pas compris où tu voyais une erreur dans la réponse qu'il donne au problème du train. Son ambition est de fournir les moyens de trouver des réponses, c'est ce que l'on peut faire ici, donc au moins pour cette fois, ça marche, non?
arizona a écrit : Mais user de l'intelligence sans valeur morale, qu'en penser ?
( Voilà qui ne fait pas fort avancer le sujet :) )
Il faut voir, si quelqu'un a envie ou pas de rebondir à partir de là. C'est une vraie question que tu poses.

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