La petite noblesse de l'intelligence. Une sociologie des enfants surdoués, Wilfried Lignier, Paris, La Découverte, coll. « Laboratoire des sciences », 2012, 356 p

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C'est ainsi que le livre est présenté par l'éditeur :
(Je me suis permis de graisser la dernière phrase car elle le vaut bien.)Ce livre s'attache à dissiper le halo de mystère qui entoure la figure de l'enfant « surdoué». D'où vient-elle ? Comment est-elle devenue, en France, sous le nom de « précocité intellectuelle », une question éducative sérieuse et officielle ? Dans quelle mesure les psychologues reconnaissent-ils cette notion ? Et surtout : qui sont, qu'attendent et que font les parents qui ont aujourd'hui recours au quotient intellectuel (QI) pour attester la grande intelligence de leur(s) enfant(s) ?
À partir d'une enquête menée notamment auprès de parents, de psychologues et de militants associatifs, ce livre relie l'affirmation de cette petite noblesse de l'intelligence que constituent les enfants surdoués à un double contexte : le développement de pratiques psychologiques privées et l'augmentation de la concurrence au sein de l'école massifiée.
De façon exemplaire, le cas des surdoués montre comment la psychologie clinique peut fonctionner comme une source légitime de singularisation des enfants dans les secteurs les plus indifférenciés de l'école (de la maternelle au début du collège). Cette singularisation a certes une fonction de réassurance pour des familles qui, bien que plutôt avantagées socialement, sont sujettes à de vives incertitudes éducatives. Mais on ne saurait ignorer les conséquences concrètes qu'a aussi l'anoblissement psychologique : l'institution scolaire se voit pressée d'accorder aux intelligences qui la dépassent les petits privilèges qui leurs sont dus.
Voilà comment Wilfried Lignier parle de son livre :
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Vous trouverais ICI un autre entretien vidéo avec l'auteur, introduit de la façon suivante :
Et dont vous pouvez regarder le contenu là :Reconnaître les « surdoués » pour aider les forts ? Entretien avec Wilfried Lignier
Dans un livre à paraître le 22 mars 2012, Wilfried Lignier propose une étude sociologique – intitulée La petite noblesse de l’intelligence – portant sur ces enfants que l’on qualifie de « surdoués ». Montrant notamment comment la « précocité intellectuelle » a été progressivement constituée comme « problème public » puis instituée par l’État, au début des années 2000, comme catégorie d’action publique, il s’interroge dans l’entretien qu’il nous a accordé sur la signification et les effets des dispositifs spécifiques mis en œuvre par les pouvoirs publics. Moyen pour les familles, appartenant généralement aux classes dominantes, d’opposer des verdicts psychologiques aux verdicts proprement scolaires, le recours au diagnostic de « précocité » apparaît ainsi comme une manière inédite de « favoriser les favorisés » (pour parler comme Pierre Bourdieu).
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En cette époque nouvelle qui nous promet en vrac : normalité retrouvée, justice, égalité et arasement de tout ce qui dépasse ; la nature de ce texte sociologique, matière universitaire éminemment politique et politisée s'il en est (les références à Bourdieu comme dans cette note : « Le racisme de l'intelligence » 1980 , suffiraient d'en convaincre) provoque en moi une désagréable impression de chasse aux sorcières en germination.
Nous verrons bien ce que l'évolution des politiques de l'Education Nationale nous réserve dans les mois et années à venir, mais dors et déjà, je m'inquiète des très, (trop) nombreuses émissions télévisées ou radiophoniques assez vides ou caricaturales qui sous prétexte de démystifier le surdoué en lui donnant un visage humain, essentiellement enfantin, a aussi comme effet de le rendre plus visible et d'une certaine façon, plus exposé à la comparaison et à la jalousie. Il s'agit en effet assez souvent d'enfant de milieux favorisés ou sinon très favorisés ; surdoués, donc doublement favorisés ; placés dans des établissements spécialisés onéreux, donc triplement favorisées. Si l'objectif de ces émissions n'est certes pas au premier chef de stigmatiser, l'effet de répétition de ces reportages s'attardant sur des cas saillants souvent exceptionnels fini par confiner à la caricature.
De la curiosité voyeuriste dont la télé est grande pourvoyeuse à la désignation d'un bouc émissaire à la vindicte populaire d'une population craignant, époque de crise oblige, de s'appauvrir, il n'y a qu'un pas et on voit bien à travers ce livre, comme il est aisé d'y parvenir en décrivant l'enfant surdoué type comme un gosse de riche nanti parmi les nantis, déshabillé de ses problèmes, soit-disant inhérents à sa condition, qui rendaient finalement son existence supportable à moins favorisé que lui et qui bénéficierait au surplus d'avantages publics hors-normes grace à un lobbying actif qui porterait aujourd'hui ses fruits... mais qu'il serait peut-être temps de dévoiler au grand jour. Car grace à la perspicacité de notre ami Wilfried, désormais, le "petit" roi est nu.
Dans un pays ou l'on a comme fierté d'avoir coupé la tête des nobles quand l'économie se portait mal et que le peuple crevait la dalle, le choix de ce titre me semble être tout sauf un choix maladroit. L'adjectif "petite" (sous couvert, j'imagine subtil, de coller au sujet) ajoutant de surcroit le mépris à la défiance.
Pour de plus amples information sur les travaux de l'auteur, rendez-vous ICI. On y trouve notamment citation de la thèse dont découle manifestement l'ouvrage cité et dont est extrait le résumé suivant :
Thèse soutenue le 25 juin 2010 : « Une noblesse psychologique. Enquête sur les appropriations sociales du diagnostic de "précocité intellectuelle" en France »
Résumé de la thèse :
