[mention]Carcharodontosaurus[/mention] Ton aigreur vis-à-vis de l'éducation nationale ne doit pas être l'arbre qui te cache la forêt, il y a, j'en connais des âmes d'enseignants qui elles-mêmes errent dans un désert d'élèves produits en série accrochés à leur instagram. L'éducnat doit éduquer des millions de mômes dans le cadre fixé par une politique en vue de produire une forme de cohérence nationale, la place autorisée à nourrir les différences est faible et surtout ce n'est pas forcément l'objectif de départ. Bref, moyens, formation, motivation (qui va avec les moyens et des salaires en bernes), etc. Enfin bon je pense que tu en as conscience, le truc formidable qui aurait dû se produire ne s'est pas produit, mais ça veut pas dire qu'il ne peut pas/jamais se produire. J'en discutais il y a peu, même à la fac, face à des enseignants qui a priori ont du lourd dans le citron, tu balances ton meilleur coup en espérant un retour à la Djokovic et paf tu vois le prof tourner les talons et ranger sa raquette dans la housse, t'as juste envie de crier "mais bordel je crois être je veux être je suis un de ces élèves que tous les jours depuis trente ans tu cherches à tirer vers le haut et je te demande là ici maintenant de me botter le cul pour me faire décoller et toi tu te barres, mais reviens, me laisse pas comme une tranche de pain de mie dessechée !". La question est de savoir si, comme dans une cristallisation amoureuse, on ne leur prête pas des qualités et intentions qu'ils n'ont pas.
La dysgraphie plus ou moins accentuée est assez typique, une très bonne amie ortho m'a expliqué cela, chez moi le trait s'accentue avec l'âge par perte d'habitude de l'écriture mais surtout parce que la pensée est là, constituée, et la coucher par écrit m'ennuie, donc je fais souvent trois lettres suivies de vagues.
Je pense que tu devrais garder un peu de désillusion en réserve car tu en auras besoin pour les années à suivre, crame pas tout maintenant. Mon parcours n'a pas eu le chaos du tien par capacité plus grande à m'intégrer (me fondre) mais j'ai toujours été parmi mes amis le cas limite (celui qui partait en forêt bourré en parlant une langue inconnue...).
@toutlemonde : Cette dernière anecdote m'offre une transition pour revenir au sujet, à savoir que je n'ai eu pour ma part aucun premier murmure puisque c'est une psy qui m'a soufflé l'idée à l'oreille (et j'ai d'ailleurs mis du temps à mettre de la viande autour de ce nonosse, l'idée pas la psy). Et je me demande en quelle mesure ce que je lis ici n'est pas une lecture retrospective des événements à l'aune d'un questionnement ou diagnostic, ce qui est mon cas pour pas mal de choses tout en ayant conscience qu'une telle relecture sera toujours opérante, on peut faire dire à peu près ce qu'on veut au passé et je me méfie du côté "le HQI lave plus blanc".
Je n'ai aucun souvenir de mes capacités de lecture, de l'âge auquel j'ai appris à lire, je me souviens, mais comme 100% des personnes que je connais, bien mieux des paroles d'une bouse des années 80 que j'exècre que des poèmes que j'ai pourtant essayé d'apprendre par coeur. J'étais un gamin curieux, chose que je croyais partager avec tous les enfants, j'étais doué avec les mots, chose que je savais ne pas être partagée par tous les enfants. Je me souviens avoir soigneusement ignoré les signaux positifs de ma prof de philo en terminale convaincu que j'étais d'être un ado lambda et plus préoccupé par le traitement de mon acné que par les choses de l'esprit. Même à la fac, j'ai ignoré les signaux (très) positifs de mes profs et mon statut de premier de promo, estimant que c'était l'effet d'une roublardise de ma part et de la nullité avérée du monde étudiant. Mon échec au capes/agrèg fut d'ailleurs une confirmation de cette nullité, obtenant ainsi la preuve que seuls les élèves issus des prépas et de l'ENS méritaient de vivre, de s'exprimer, d'écrire, etc. Puis professionnellement j'ai continué à ignorer les signaux positifs des clients, collègues, etc. estimant que je n'avais qu'une part modeste dans ma réussite et qu'après tout (pour l'apiculture) c'était les abeilles et la météo qui faisaient le boulot.
Une psy passant par là pour panser les plaies d'une blessure narcissique, amoureuse et quand même un peu originelle, m'a incité à envisager l'affaire du QI (je me souviens de mon ancienne compagne me montrant un livre sur les surdoués à une époque où elle avait un gros coup de moins bien, et moi regardant stupéfait la chose comme j'aurais lu un manifeste pour les amateurs de danse country, c'est-à-dire une chose qui ne pouvait pas me concerner, ni elle d'ailleurs, parce que je le rappelle un surdoué c'était quelqu'un qui sortait de la rue d'Ulm, évidemment).
La seule manifestation chez moi et chez les autres de ce qu'on appelle (désormais) mon intelligence, c'était ce qu'à l'époque je/eux appelions ma prétention, ma pédanterie, mon caractère emmerdeur, querelleur, contradictoire, bref ma chianterie chiantissime dont la vie finirait par révéler la vacuité et me mettre devant cette évidence que j'étais un looser pathétique. Ceci dit l'hypothèse d'être un tel looser prétentieux chiant et pathétique subsiste mais je regarde aujourd'hui ce personnage avec un peu plus d'indulgence (mais on finit par apprécier même les verrues d'une personne avec qui on vit depuis toujours, je suis sûr qu'on peut même trouver qu'une moustache c'est pas si laid).
Tout ça pour dire que ce fil
et celui-ci me passionnent au plus haut point parce qu'il évoque des ressentis que je n'ai jamais eu : l'idée même d'envisager une seconde par moi-même la possibilité d'être surdoué. Je trouve que c'est au moins une des forces de la médiatisation de cette thématique que de donner la possibilité à des personnes de se poser spontanément la question et de trouver seules le chemin vers ce forum ou d'autres et in fine de passer le test. Donc c'est chouette d'avoir la lucidité et le courage de suivre le petit filet d'eau du murmure et c'est chouette aussi (en ce qui me concerne) d'avoir croisé une psy qui a eu le courage et la lucidité (courage parce qu'elle engageait un peu son flair) de me le crier bien fort dans les cages à miel.
Et ce serait chouette, pour reprendre le début du post, de croiser un ou une enseignante qui lirait cette attente pour ce qu'elle est, un désir violent de s'élever (et pas de se coucher, quoique c'est à moduler en fonction de l'enseignante), qui peut être effrayant tant l'attente dans mon cas est grande. Je crois qu'on se soigne difficilement des rêves d'un Robin Williams chantant Whitman "ô capitaine mon capitaine", ça fait quand même partie d'un imaginaire bien puissant. Mais peut-être, une fois le diag+ posé, est-ce à nous de devenir ceux qui tirent les autres vers le haut...pas facile d'accepter une telle responsabilité et reste à savoir si on est à la hauteur
