A la limite oui, je pense que la dépénalisation pourrait, peut-être, être un compromis. Dans le sens ou ça permettrait de ne pas emprisonner, condamner une prostituée d'un point de vue pénal, sans pour autant inciter à la prostitution à un niveau civil et fiscal. Cela permettrait d'avoir de meilleurs relations d'aide sociale (elles auraient peut-être plus de facilité à se rendre dans des centres de soins ou d'aide et moins peur de la police).
Et peut-être qu'il faudrait faire de la prévention dans les établissements scolaires, exactement comme on fait avec l'éducation sexuelle, en expliquant aux ados que le corps n'est pas un objet comme les autres, et inculquer le plus tôt possible la notion de respect de soi aux enfants.
D'ailleurs je fais un lien avec un film, dont Cyrano a fait une belle critique : Polisse. On y parle effectivement, de mineurs qui font des actes sexuels contre une rémunération en nature (dans le film un téléphone), je pense que c'est effectivement une forme de prostitution, et que ici l'éducation et la prévention aurait un rôle à jouer.
Après c'est vrai que la prostitution comme le dit Fabs est très polymorphe, et que c'est difficile de toucher tous les publics. Mais je pense que le but serait dans un premier temps, d'endiguer le recours à la prostitution comme moyen de subsistance en donnant une autre alternative, et en redonnant aussi des points de repère sociaux.Il ne s'agit pas de faire de la morale, mais d'éviter à des jeunes de rentrer dans un milieu dont il est très difficile de sortir par la suite par erreur. Leur donner un véritable moyen de faire un choix éclairé, et de se rendre compte de ce que c'est que ce travail dans la réalité, et pas dans le fantasme. Certaines séries TV, ont mis en scène l'univers de call girls de luxe, ou encore de travailleuses du sexe, mais il faut bien comprendre que c'est de la fiction, et que la réalité n'est pas comme ça.
Pour un aspect concret, un exemple (et oui qui me touche personnellement malheureusement) : ma petite cousine qui a 14 ans, échange ses services physiques contre du soutien en cours d'histoire avec un élève du lycée parce qu'elle veut avoir son brevet des collèges (et pour la petite histoire elle l'a eu avec mention). Elle n'a aucune notion du respect de son corps, ni de l'importance de l'acte sexuel, de ce qu'il représente. Elle s'imagine que son corps est monnayable à l'infini, et elle fait souvent des actes dégradants pour elle même pour obtenir des choses vraiment futiles (des bonbons, des clopes). Il y a clairement des confusions très graves, et malheureusement elle est loin d'être un cas isolé. D'ailleurs elle n'a même pas de notion de ce qu'est la prostitution, pour elle ce qu'elle fait n'en est pas. Elle reste sur cette image d'une femme dans la rue qui " fait le tapin ".
C'est en ce sens que je pense que la prévention aurait un rôle fondamental à jouer.
Enfin je voulais revenir sur un dernier point : il a été fait allusion aux maisons closes d'antan. Je souhaite rappeler à tous ce qu'était la condition des femmes exerçant dans ces maisons. Elles avaient effectivement un statut reconnu par la loi, elles avaient le statut de femmes publiques. Elle avait une carte de travail, et elles étaient fichées dans les services de police. Elles n'avaient quasiment pas le droit de sortir le jour (une seule sortie par semaine qui devait être déclarée aux services de police et justifiée), elles n'avaient même pas le droit de se tenir aux fenêtres pendant la journée. Elles exerçaient sous l'autorité d'un homme ou d'une femme (un maquereau ou une maquerelle), et n'étaient pas libre de refuser des clients. La seule chose qu'elle pouvaient dénoncer était les coups, car il ne fallait pas les abimer physiquement (sinon elles n'étaient plus rentables), elles devaient payer leur entretien dans la maison, leurs vêtements, leur nourriture etc ... tout cela était déduit de leur salaire et bien souvent elles devaient s'endetter pour continuer à vivre, du coup elles vivaient avec une perpétuelle dette à racheter et ne pouvaient pas partir des maisons closes. Lorsqu'elles tombaient enceintes on les obligeait à avorter dans des conditions qui les menaient souvent à la mort. Elles ne pouvaient ni se marier, ni avoir de relation affectives avec un homme, ni avoir d'enfants.
Alors oui les maisons closes remplissaient un rôle social, mais à quel prix pour ses femmes ? On ne peut pas parler ici du libre exercice de la prostitution, ni de femmes libres et d'un regard social intégrateur sur la prostitution.