Puisqu'on peut cocher trois cases, je réponds d'abord "
Qu'est-ce qu'un roman sentimental ?" - mais la question a déjà été posée par
@Fu, au sens où je l'entendais. Si l'on avait au contraire parlé ici de mouvements artistiques des XVIIIe et XIXe siècles, du
sentimentalisme au sens
Sturm und Drang du terme, j'aurais pu dire que j'en ai lu. La notion de
romantisme est à l'origine d'un quiproquo récurrent de mon adolescence dans la mesure où, justement, j'avais intégré le terme au sens du courant artistique, apparemment bien plus tôt que la majorité de mes semblables et de manière plus exclusive que la plupart des gens que je rencontrais. Comme, donc, le terme ne se résumait dans la langue courante qu'aux sentiments amoureux, il y avait toujours une dissonance manifeste entre mon intérêt proclamé pour le
Romantisme et le fait que, manifestement, je n'avais à titre personnel jamais manifesté de près ou de loin une quelconque inclination pour la relation amoureuse ou ce qui en tient lieu chez des collégiens. Et comme je n'avais pas encore de smartphone dans mon sac permettant de montrer n'importe-quelle définition à tout instant, et que je ne me promenais pas avec un tableau de Caspar David Friedrich dans mes petites papattes, c'était sans fin. Voilà, c'était : "
Die Leiden des jungen Kätzchen" (les souffrances du jeune chaton).
Je réponds ensuite que ça ne m'attire pas, dans la limite, donc, de la définition retenue du genre. Je peux lire des romans sans ambition littéraire particulière, et je suis bon public si c'est un peu naïf, et où, éventuellement, un enjeu amoureux peut prendre une place de premier plan ; mais alors c'est en fait le contexte (historique, culturel, géographique...) qui compose un récit qui me change les idées. Ensuite, une forme basique d'empathie fait que si le personnage principal recherche
l'amûûûr parce que c'est la clef de son bonheur, cela me touche qu'il souffre quand il ne le trouve pas et qu'il soit heureux quand il le trouve, mais cela fonctionne aussi bien si sa quête est celle de la solitude au fond des bois, du salut de l'âme, de la liberté, de la pierre philosophale, du bolchévisme
ou de l'invasion du pays voisin. Donc je crois que ça rejoint le critère : lire éventuellement des romans sentimentaux
et historiques (ou de SF, ou d'aventure, etc).
Comme ensuite j'ai une sensibilité probablement exacerbée à certains aspects formels, un texte "mal écrit" au sens stylistique ne me fait pas envie. Après, il est assez clair que c'est uniquement sur la base de la mauvaise réputation de la littérature "à l'eau de rose" au sens courant du terme que je n'ai justement jamais eu l'envie d'en lire (parce-qu'affirmer :
je n'en ai jamais lu parce que c'est mal écrit, ça ne veut absolument rien dire

).
Or à l'inverse, je ne verrai aucun désagrément à relire
Manon Lescaut,
Paul et Virginie ou
Julie ou la nouvelle Héloïse, récits dont l'enjeu dominant est le sentiment amoureux
comme revendication (pré-)romantique (donc émancipation et légitimation des émotions, ici face aux conventions sociales) ; sans compter ce genre de texte bénéficie d'un soin stylistique qui, sans être nécessairement le sommet de leur siècle en la matière, n'en prend pas moins un aspect rétrospectivement assez sophistiqué par la seule distance qui nous en sépare désormais.
Et enfin je réponds que c'est un genre dangereux, parce que je trouve la formule rigolote et que personne n'avait répondu ça, donc on ne va pas laisser cette case orpheline. Or vous avez déjà évoqué la question sur le plan historique, d'aucuns ont voulu substituer une littérature
édifiante à une littérature
dangereuse. D'ailleurs
Manon Lescaut ou
Julie c'est clairement dangereux et ça a été interdit tôt ou tard. Merci de ne pas faire le raccourci aussi télévisuel que fortuit avec
Julie Lescaut car ça vient de me sauter au visage et maintenant je n'arrive plus à m'en débarrasser, alors qu'il faudrait le garder pour un futur sondage "regardez-vous des feuilletons policiers".
Finalement, le danger pour notre siècle, ce serait plutôt le modèle de l'ancienne littérature
édifiante si, d'aventure, les éditeurs se piquaient de publier de nouveau des récits encourageant un modèle social qui aurait, à l'égard de la société contemporaine, un caractère ultra-conservateur. Merci de ne pas souffler l'idée à Bolloré.
Mais voulez-vous que je vous dise, le
vrai danger n'est pas là. Le péril qui nous menace, c'est la popularisation de la lecture en général, tous livres confondus, des écrans, des jeux, des photos, des films, et de tout ce qui détourne les gens de leur devoir. En effet, c'est parce qu'il avait l'esprit occupé à des sottises que le surveillant d'une centrale nucléaire située en Ukraine, le 26 avril 1986, n'a pas vu arriver la catastrophe qui s'ensuivit. J'avais quelque scrupule à le dénoncer, mais il faut que la vérité éclate, explose, irradie, se répande un peu partout de manière incontrôlable et subsiste pendant des siècles (oui, c'est puissant, la vérité). Voyez d'ailleurs son identité ci-dessous.
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Honte à toi, Homer Abramovitch Simpson.
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Гомер Абрамо́вич Ϲимпсон
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